Mascha Halberstadt a décidément plus d’un tour - et d’un animal - dans son sac. Après avoir conquis les salles obscures avec son premier long métrage Un amour de cochon, désormais pierre angulaire d’une véritable franchise porcine, la voici qui revient avec Renard et Lapine sauvent la forêt, un film présenté en finition au Cartoon Movie 2023, et qui a su ravir le public d’Anima plus tôt cette année. Que vaut la dernière itération de ce duo passé de la page au petit, puis au grand écran? Une gourmandise croustillante pour petits et grands, grâce à l’énergie communicative de cette réalisatrice hors norme.
Renard et Lapine sauvent la forêt, de Mascha Halberstadt (2024)

Dans Renard et Lapine sauvent la forêt, le duo et leurs amis - parmi lesquels un hibou peureux, un sanglier flamboyant ou encore une sirène mélomane - font les frais de l’ambition gigantesque de Castor, qui noie leur forêt avec son barrage monumental. Loin de s’en excuser, le rongeur semble plutôt bien décidé à empêcher quiconque de se mettre en travers de son chemin, lui qui ne rêve que d’une chose : qu’on l’admire pour son génie. À ce méli-mélo s’ajoutent encore deux rats fripons, un morse brocanteur, et un pingouin doué pour le déguisement. Pourtant, loin d’être amphigourique, ce film réussit dès les premières minutes à embarquer son public dans les aventures de cette galerie de personnages pittoresques, aux mimiques et aux répliques qui feront sourire plus d’un adulte. À la manière d’Un amour de cochon, ou de Koning Worst, moyen métrage musical adapté du même univers, Mascha Halberstadt amène une bonne dose d’humour bien senti à son film, avec des répliques et des mélodies qui ne s’oublient pas si vite. Mention spéciale à ce Castor grotesque et grandiloquent, infusé à l’idéologie américanocapitaliste, que la réalisatrice elle-même qualifie de “croisement entre Donald Trump et Owen Wilson”. Tout un programme.
Désopilant, le film l’est aussi grâce à son esthétique finement travaillée pour servir son propos et son humour. Les personnages, travaillés en argile avant d’être scannés pour une animation en 3D, sont très facilement reconnaissables et se distinguent par leurs visages espiègles, leurs postures loufoques ou leurs attitudes plus farfelues les unes que les autres. Tandis que le monde qui les entoure, et particulièrement la hutte de Castor, regorge d’idées de mise en scène et d’accessoires aussi malins qu’impressionnants. Une belle réussite pour le studio Walking the Dog, décidément partenaire de choix pour les projets d’animation les plus ambitieux, du récent Où est Anne Frank d’Ari Folman à ce film, en passant par le succès international Richard The Stork 2.
Piochant ses références dans le cinéma de kung-fu, dans la comédie musicale, mais aussi dans l’histoire du cinéma en stop-motion - on ne peut s’empêcher de penser au duo de rats de Chicken Run -, Renard et Lapine sauvent la forêt arrive à transformer une petite querelle de voisinage en une aventure épique à hauteur d’enfant, avec l’amitié et l’entraide comme seule solution possible face à l’adversité. Un film doux et mignon, avec cette petite touche unique qu’apporte la réalisatrice à chacune de ses productions. À croquer.