Les doigts de pied de Laurent Denis
Il n’y a guère d’activités pour les pensionnaires des maisons de retraite. Souvent, leurs chambres deviennent des cellules d’ennui rythmées, de temps à autre, par les entrées et sorties des infirmières. La solitude prend alors le pas, en l’absence des visites des familles, qui s’espacent petit à petit pour ne plus exister que dans les souvenirs.
C’est un peu ce monde-là que l’on imagine autour d’Arthur, un vieil homme dans le dernier quart de sa vie, apparemment pas vraiment bien dans sa peau, recroquevillé dans son lit, s’apprêtant à voir passer une journée de plus agrémentée du seul son d’un coucou presque guilleret. Presque…
Mais aujourd’hui est un jour différent. Arthur reçoit ! L’infirmière introduit dans sa chambre son visiteur en complet noir et tout semble s’éclairer sur le visage du vieil homme. Dès le matin, il s’était préparé, faisant sa toilette, s’habillant à quatre épingles, afin d’être parfaitement présentable.
Dans la petite pièce sobre, seul le lit offre un lieu de repos aux séants de nos deux compères.
C’est qu’il va être question de confort, de garniture en soie ou en satin, de la couleur du cercueil dont on apprend que le blanc crème est à la mode.
Arthur semble en tout cas très heureux d’avoir trouvé un peu d’animation. Mais… ne l’a-t-il pas un peu cherché ?
Illustration de Gwendoline Clossais