Pavane de Pauline Gay

Sonnerie de réveil qui se superpose à un noir d'encre. Sur cet aplat, une voix de femme fine, claire, récite « Pour ma mère, le matin, c'est la nuit » tandis qu'apparaît une femme, le visage contre la vitre du métro. La voix poursuit un monologue poétique et installe le décor. Dans ce métro, des gens partent au travail de bonne heure, le visage à peine réveillé, le corps encore enveloppé par la torpeur nocturne. Puis, sans transition, on reçoit en pleine face le bruit agressif de poulets complètement nus qui dansent sur des rails qui les amènent à leur destin nourricier. C'est l'usine et le travail à la chaîne. Dans cet univers très rythmé, la chance d'avoir un travail est très précieuse malgré ses conséquences. L'effort, l'énergie donnés durant des années s'accumulent jusqu'au jour de la retraite, lorsqu'on y arrive, avec à la clé une reconnaissance éphémère contenue dans un petit objet, au mieux une prime. Corinne Masiero y joue - dans un rôle de composition à l'opposé de sa personnalité de syndicaliste dans le cinéma - une mère qui déplore que sa fille s'amuse à faire du cinéma. Nous savons tous et toutes que le cinéma c'est du rêve, du bon temps, du loisir, bien éloigné d'un vrai travail. Or, dans cette histoire inspirée d'un certain vécu, la réalisatrice émet l'hypothèse irrévérencieuse envers les ouvriers et tous ceux qui bossent vraiment, que faire un film s'inscrit dans un chemin de vie qui n'a pas à rougir ni à culpabiliser. Combien de fois n'avons-nous pas entendu des récits où des parents conseillaient quand ils ne le réclamaient pas avec force qu'il fallait d'abord un diplôme avant de s'engager dans la pratique des beaux-arts, quand bien même ce n'était que le 7e. Il faut alors tenir bon et persévérer envers et contre tout.

Pavane fut présenté dans la compétition nationale du dernier Festival du Court métrage de Clermont-Ferrand.