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Hannah Arendt

Publié le 15/11/2013 par / Catégorie: Sortie DVD

La philosophie est un sport de combat

Le biopic se porte bien, et les films du genre apparaissent régulièrement sur nos écrans. Des films bien souvent paresseux, se reposant sur le ravalement de façade de l'interprète du rôle-titre et de la sympathie supposée du spectateur pour le sujet, n'évitant parfois pas la réécriture malhonnête de l'Histoire. Margarethe von Trotta évite ces écueils en offrant un film sérieux, mais scolaire.

Hannah ArendtLa réalisatrice allemande ne filme heureusement pas toute la vie de la philosophe allemande, mais se concentre sur les années 61-65 et l'affaire Eichmann, hormis les forts dispensables flashbacks la mettant en scène avec Heidegger, la Walkyrie à moustache qui fut son amant et maître à penser.

Arendt est envoyée à Jérusalem en 61-62 par le New Yorker pour suivre le procès d'Adolf Eichmann ancien responsable SS chargé de la logistique ferroviaire de la solution finale. Elle en revient avec un livre, Eichmann à Jérusalem ou la banalité du mal et une théorie éponyme parue dans le New Yorker qui fit grand scandale. Eichmann, pour faire très court, n'est pas, pour Arendt, un monstre sanguinaire et fanatique, mais un petit fonctionnaire médiocre et zélé, rouage lâche parmi d'autres d'un système inhumain.

Hanna ArendtEichmann, justement, apparaît dans le film via les images d'archives (1) du procès judicieusement incorporées par la cinéaste. Celle-ci s'attache autant à représenter la femme Hannah que la philosophe Arendt (très belle interprétation de Barbara Sukowa). Les débats de l'intelligentsia new-yorkaise ou l'isolement d'Arendt face à la campagne massive de dénigrement dont est l'objet sont autant d'occasions pour la réalisatrice d'évoquer habilement les questions de la mémoire et des toujours complexes rapports entre judaïsme et sionisme. Mais le film porte en lui les défauts de ses qualités.

Si la théorie arendtienne est clairement exposée grâce à une mise en scène sobre et rigoureuse, l'académisme jusqu'au-boutiste dont fait preuve Von Trotta ne permet aucune audace, tant dans la représentation du cheminement de la pensée que dans l'interrogation de celle-ci.

Hannah Arendt n'étant finalement - mais c'est déjà pas mal - qu'une bonne façon de (re)découvrir une des figures intellectuelles majeures du XXe siècle.

Notons également la mauvaise qualité du sous-titrage, entre fautes grossières et traductions approximatives.

Hannah Arendt est édité par Homescreen et distribué par ABC distribution.