La Stratégie du choc de Noami Klein
La stratégie du choc, le livre de Noami Klein, est débattu depuis sa parution en 2007 dans le monde anglo-saxon. Les économistes, les historiens, considèrent que le livre est aussi important que la thèse de Francis Fukuyama proclamant, in fine, la fin de l'histoire. Noami Klein nous explique qu'il vaut mieux la connaître afin (peut-être) d'arrêter de faire des guerres dont le profit ne sert qu'à quelques-uns et qui alimentent l'hybris (l'orgueil, la super puissance) de quelques autres.
Désormais, nous disposons d'un film (en DVD) de Michael Winterbottom et Mat Whitecross. En 80 minutes, les deux réalisateurs essaient de résumer le parcours historique du cancer néolibéral, un modèle toxique qui détruit les économies et, pire encore, pollue les environnements – aussi physiques que mentaux – dans un cauchemar techniciste qui ne ravit que les spéculateurs. Ceux-là même qui, grâce à la technique, investissent et désinvestissent en 3 secondes pour enterrer leur magot dans les paradis fiscaux.
L'histoire, donc, qui pas plus que le temps ne s'arrête jamais. Tout d'abord, celle de l'économiste de Chicago nobélisé, Milton Friedman, horrifié par le mariage du couple privé/public, cette régulation que le duo Roosevelt/Keynes a imposée aux USA après la crise de 1929 (laquelle, on ne s'en souvient que trop, nous a menés à la guerre de 1939-1945). Comment renverser cette horreur de l'Etat avec lequel la sphère privée est liée ? Grâce à la stratégie du choc. Flash-back. En 1973, le président Allende, élu démocratiquement, est renversé par un putsch militaire dans une guerre qui, en plus de dix ans, fera quelques milliers de morts. Friedman envoie les Chicago boys rejoindre la dictature de Pinochet pour tester son paradigme. Ces jeunes économistes lancent un programme de privatisation massif pour réduire la sphère publique. Le chômage s'accroît, l'échec est total, sauf pour quelques-uns. Qu'importe, le couple Reagan/Thatcher va imposer cette ahurissante doctrine du capitalisme du désastre en exploitant les chocs naturels ou guerriers (outre Pinochet, Noami Klein nous parle de la guerre insensée des Malouines, de l'ouragan Katrina, du tsunami dans le sud-est asiatique, de la guerre en Irak et, moins connu, du bombardement, chars d'assauts à l'appui, du parlement russe protégé par les citoyens qui venaient de les élire et qui voulaient défendre les biens de l'état plutôt que de les offrir aux Oligarques)
Désormais, tous les économistes – nobélisés ou non – participent au débat sur une orthodoxie qui prétend que l'économie de marché = démocratie. Les Irakiens ont appris, à leurs dépens, le bienfait du privé puisque même l'armée américaine a fini par être remplacée par des milices privées (suite sur le site Wikileaks via Internet). Jeffrey Sachs, mis en cause par Noami Klein pour son programme en Pologne et dans la Russie de Poutine, pense que Klein exagère (on se doute bien qu'il n'a pas téléphoné à Poutine pour lui ordonner de faire taire les représentants du peuple au Parlement russe avec ses blindés). Néanmoins, il reconnaît : « Je suis complètement d'accord avec l'idée que l'idéologie extrémiste du marché dérégulé des années 1980 est devenu hors contrôle ». Il devient difficile, après l'épisode gargantuesque des « subprimes » et de Mister Madoff avec son fonds spéculatif, de défendre les pirates du bref-bref systémique.
Signalons que le film est un résumé du livre qu'il convient de lire pour argumenter le débat avec plein de détails supplémentaires.
La stratégie du choc (la montée du capitalisme du désastre), d'après le livre de Noami Klein chez Actes Sud, réalisé par Michael Winterbottom et Mat Whitcross, éditions Montparnasse, accessible via Libération films qui loue les droits de diffusion publique du film.