L'incroyable pouvoir de la musique
Après une incursion réussie dans le domaine dramatique avec le formidable Va Vis et Deviens, Radu Mihaileanu, pour son quatrième long métrage, retourne sur le terrain de la comédie sociale « à la slave », où le mélodrame et un humour parfaitement farfelu se mélangent sur un rythme de plus en plus débridé. Un exercice « à la Kusturica » plutôt bien mené, sauf que, là où le maître yougoslave maîtrise en virtuose tous les paramètres de son film, le cinéaste roumain s’avère incapable de contenir les outrances, inhérentes au processus, dans les limites du bon goût. Le film perd ainsi pas mal de sa crédibilité dans une enfilade de clichés à la limite du politiquement correct (les Russes sont tous des mafieux milliardaires ou bien pauvres, alcooliques et combinards, les Juifs ne perdent jamais le sens des affaires, les Tsiganes sont mal aimés, mais généreux et débrouillards, etc…) et aligne, avec plus ou moins de bonheur, des vannes pas toujours des plus fines. Mais ce maelström un peu foutraque emporte néanmoins l’adhésion du spectateur grâce à une formidable générosité et une humanité à fleur de peau. Mihaileanu crée de véritables personnages, émouvants et prenants, et réussit à accrocher le spectateur sur un scénario qui aurait mérité un traitement plus équilibré.
Surtout, il y a cette séquence finale, les 20 minutes de concert filmées de façon étourdissante et montées en virtuose où, rarement, la puissance de la musique n’aura été évoquée de façon aussi convaincante. Elle balaie sur son passage les excès et les maladresses, et permet au spectateur de sortir de la vision du Concert avec des étoiles dans les yeux. Radu Mihaileanu a d'ailleurs bénéficié de la reconnaissance de ses pairs qui ont nominé le film à six reprises pour les Césars 2010, dont pour le meilleur film, et le meilleur réalisateur et lui ont décerné deux récompenses, pour la meilleure musique et le meilleur son.