Le Scaphandre et le papillon de Julian Schnabel

Couler comme un scaphandrier dans l’eau, être prisonnier de son corps. Jean-Dominique Bauby dit Jean-Do, rédacteur en chef du magazine Elle, éprouve cette double sensation lorsqu’il se réveille à l’hôpital, après trois semaines de coma suite à un accident cardio-vasculaire. Le journaliste est atteint du « locked-in-syndrome ». Tout son corps est paralysé à une exception près : son œil gauche. Rapidement, l’organe représentera son seul moyen de communication. En battant des cils, Jean-Do sera en mesure de « parler » avec son équipe soignante et ses proches, mais aussi de dicter un livre liée à son expérience, « Le Scaphandre et le papillon » (Editions Robert Laffont 1997). Dix jours après parution, Jean-Do s’éteindra.
Vu le sujet, des précautions sont toutefois prises. La langue, par exemple. Dans le bonus du DVD, le réalisateur, interviewé par Laurent Weil, journaliste ciné à Canal + , parle de son intérêt pour que le film se fasse en français. « J'ai toujours été convaincu que ce film devait être tourné en français. C’est l’itinéraire d’un Français dans un hôpital français. Je ne pense pas que j’aurais pu tourner le film ailleurs qu’en France. » Lors de la préparation, il rencontre d'ailleurs, à l'hôpital de Berck-sur-Mer, l’équipe médicale en charge du malade à l’époque et ceux qui l’ont connu.
Après, il y a l’imagination. Celle de Jean-Do (campé par le tout juste césarisé Mathieu Amalric) : « À part mon œil, il y a deux choses qui ne sont pas paralysées : mon imagination et ma mémoire. Ce sont les deux seuls moyens de m'évader de mon scaphandre. Je peux imaginer n'importe quoi, n'importe qui. Rendre visite à la femme que j'aime, vivre mes rêves d'enfant et mes ambitions d'adulte » . Celle définie par Julian Schnabel : « Tout ce que le personnage pouvait imaginer devenait possible. Cette forme de déconstruction a structuré le film en me laissant la liberté de faire ce que je voulais ». C'est-à-dire ? Faire intervenir, dans le film, des photos de Marlon Brando, des images de montagne, de corrida, de scaphandres, d'impératrice, de danseur,... La pression se libère du corps, le fantasme commence et virevolte d'une image à l'autre, tel un papillon.
Par moments, l'évasion s'arrête et le réel reprend. On se raccroche alors à cet œil unique, central, mais aussi à la voix-off profonde de Mathieu Amalric. Schnabel, toujours : « Bauby ne pouvait pas parler, mais il communiquait avec sa paupière gauche. Dans le film, le spectateur peut l'entendre par le biais de la voix-off. Aucun des personnages du film ne sait ce qui se passe dans la tête de ce type, mais le spectateur le sait, car il entend ses pensées. » Les personnages ? Autour de Mathieu Amalric, il y a Emmanuelle Seigner, Marie-Josée Croze, Anne Consigny, Patrick Chesnais, Niels Arestrup, Olatz Lopez Garmendia, Jean-Pierre Cassel, Marina Hands et Max von Sydow. Rien que ça. Et nous, public confident d'une humanité et d'un humour préservés.
En DVD : Le Scaphandre et le papillon de Julian Schnabel. Bonus : Interview de Laurent Weil, bande-annonce, Promo Réel de Berlin, galerie photo signée Etienne George. Distribution : Melimedias.