Cinergie.be

Twin Peaks 2

Publié le 01/02/2008 par Jean-Michel Vlaeminckx / Catégorie: Sortie DVD
Twin Peaks 2

Vous avez vu INLAND EMPIRE et vous avez aimé. On l’espère. Vous n’êtes pas de ceux qui ont dit : « bof, c’est comme Persona de Bergman ». Sans blague, pourquoi pas comme Juliette des esprits de Fellini, Trois femmes de Robert Altman, Vertigo d’Hitchcock, etc. ? Bref, vous attendez le prochain film de Lynch en vous demandant s’il va poursuivre un chemin tortueux, sans « belles images » et sur un support numérique qui est, peut-être, celui de demain. En attendant, voici Twin Peaks 2, en deux coffrets DVD, pour calmer votre impatience. Des épisodes aussi déstructurés que les premiers et dans lesquels Lynch fait un clin d’œil (pas pareil !) à Vertigo et à Laura d’Otto Preminger. On vous a présenté les premiers épisodes de la série dans le webzine 121 de novembre.

L’épisode 7 se terminait par des coups de feux sur Dale Cooper, l’extravaguant et farfelu agent du FBI s’écroulant sur le sol de sa propre chambre. La série 8, réalisée par David Lynch, redémarre sur Dale Cooper touché au ventre, étalé sur le sol, avec un très vieil homme de chambre, complètement sourd, qui veut lui filer un verre de lait. Quant à la belle aguicheuse Audrey Horn, amoureuse de l’agent Cooper (sa lettre continue à circuler sous le lit de l’agent du FBI sans être lue), elle est prisonnière au « Jack n’a qu’un œil ». Il s’agit d’un bordel situé de l’autre côté de la frontière, où Blakie l’a engagée grâce à son savoir-faire avec les queues de cerise qu’elle noue avec sa langue. Va-t-elle pouvoir être sauvée de cet endroit très rose dans lequel elle espère découvrir les passions secrètes de Laura Palmer ? Frissonnons, frissonnons. Entre deux donuts et une tas

se de café, l’agent spécial Dale Cooper, accompagné de l’incontournable shérif Harry S. Truman, va-t-il pouvoir se rendre sur les lieux pour délivrer Audrey ?
Josie, la belle Chinoise, la copine du shérif Truman, est de retour après l’incendie de la scierie Packard mais devient la bonne et la bête de Catherine Martell, la patronne de la scierie. On l’a vue dès le début, près du lac où Pete Martell découvrait le corps de la blonde Laura Palmer. Celle-ci a une cousine aux cheveux bruns, Madeleine Ferguson (les deux rôles sont joués par Sheryl Lee) que le père de Laura, Leland Palmer, possédé par Bob, va assassiner.

Carrément œdipien. Leland Palmer, c’est Oedipe roi ! Mais qui est Bob ? Bonne question ! L’envers du décor ? L’envers maléfique de Cooper, son mal refoulé ? L’empereur noir de la ville de Twin Peaks ou, pour paraphraser Bresson, le diable probablement, qu’on n’arrête pas de voir surgir lors des 29 épisodes, explosant tout feu tout flamme. Bob, le maléfique, c’est l’enfer. Même l’agent spécial Cooper est comme deux ronds de flan face à Bob (sans ses donuts, avouons-le).

 Ben Horn, le père d’Audrey, devenu de plus en plus cinglé (général Lee devenu) crée une maquette de la bataille de Gettysburg dans son bureau. On termine avec les inoubliables scènes de la Red Room, la chambre rouge, où trône un nain qui parle à l’envers (on le retrouve dans Fire Walk With Me, le long métrage que Lynch a consacré sur les débuts de Twin Peaks) et un personnage que Dale Cooper a rencontré dans ses différents rêves, une sorte d’ange annonciateur des catastrophes à venir, l’envers de Bob. Chaque série donne accès, de façon compulsive, à la dame à la bûche. La log lady porte sa bûche (ayant le don de vision) comme un bébé.
Et enfin, impossible de laisser cela sous silence, on est sous le charme de la musique envoûtante d’Angelo Badalamenti.

David Lynch a réalisé les séries 8, 9 ,14 et 29 (final). La quatorzième, offerte dans ces deux coffrets, est un des sommets de la série des vingt épisodes, digne d’un long métrage. Vous savez que Lynch a horreur de s’expliquer et de laisser ses films être chapitrés lors de la sortie en DVD. Alors quoi ? Treize acteurs et actrices interviewés sur les anecdotes de tournages et l’héritage de Twin Peaks.

Retenons, outre Kyle MacLachlan (Cooper), Mädchen Amick (Shelly Johnson) et surtout Sherilyn Fenn (la superbe Audrey Horn) qui nous explique : « David se fichait complètement de ce que disait les gens de l’audimat, qu’il fallait entrer dans tels ou tels critères. L’équipe s’en fichait. Ils ne s’adressaient pas à la majorité des téléspectateurs. Ils restaient fidèles à une vision, sans se laisser influencer par l’extérieur. Ils gardaient en tête leur idée originale. La série ne parlait pas forcément de  gens « sympas », mais plutôt de gens réels… La télévision avait besoin d’un programme original n’étant pas une insulte à l’intelligence du public, des séries qui fassent réfléchir comme tous les films de David ». On boit du petit-lait !
Jennifer Lynch, la fille du maître, nous parle du livre qu’elle a écrit : Le journal secret de Laura Palmer. Et à défaut de David Lynch en personne, cinq réalisateurs des séries nous parlent de leur travail. Citons Tim Hunter (épisodes 18 & 28) : « La séquence du concours de beauté a été tournée à deux caméras pour filmer l’ensemble en une seule prise. Tous les effets spéciaux de Twin Peaks étaient produits sur le plateau pour dépenser le moins possible ».

Twin Peaks, Saison 2, vingt-deux épisodes, 2 coffrets de 4 DVD chacun, David Lynch et Mark Frost, édité par TF1 vidéo et distribué par Belga Films