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Son altesse protocole de Aurélie Reinhorn

Publié le 30/05/2023 par Basile Pernet / Catégorie: Critique

Dans les coulisses d’un parc d’attractions sur le thème des contes de fées, une femme nommée Wanda fait sa première journée en tant que comédienne, sous les traits d’un lutin puis d’une princesse. Mais une machine à rêves qui est aussi une machine à sous n’a que vanité pour seule féérie.

Son altesse protocole de Aurélie Reinhorn

Après avoir refusé les premières recommandations de sa conseillère Pôle Emploi pour devenir développeuse web puis soldate, Wanda opte pour lutin. Poussant les portes du parc d’attractions, elle croise le chemin d’autres personnages merveilleux, mais aussi de femmes et d’hommes venus comme elle gagner leur argent du mois ou compléter leur intermittence. Dirigé par un petit bonhomme vil et mesquin (mais surtout ridicule et stupide), ce parc d’attractions ressemble à n’importe quelle entreprise libérale hiérarchisée, dans laquelle l’image extérieure prime plus que partout ailleurs. C’est par son intrépidité que Wanda met ce petit chef K.O et obtient le rôle de princesse, très convoité par certaines au sein de l’équipe.

Aurélie Reinhorn ne montre que les coulisses du parc, pendant les longues pauses qui séparent les différents spectacles quotidiens. D’enfants surexcités on n’entend que les cris lointains, pour embrasser complètement l’espace intérieur, celui d’employés coincés entre fiction et réalité. Certains se résignent, ou bien se gavent d’illusions, d’autres se soulèvent contre l’autorité, tandis que d’autres enfin perdent lentement la raison... La réalité contient un vide infini, indescriptible et contrariant, que le mélange des genres et des registres narratifs accentue superbement. Le féérique a quelque chose de trivial quand les chorégraphies et les chants s’arrêtent.

Son altesse protocole est un bijou de comédie burlesque, fort inventif et haut en couleur. D’un côté des scènes absurdes et truculentes, chargées d’un comique de mots et de situations ; de l’autre une caricature malaisante, parce que très habile, révélant l’insolence des intentions de réalisation. Une attention très appréciée est portée aux costumes, coiffures et maquillages, pour une mise en scène travaillée au millimètre et des émotions véhiculées avec beaucoup de justesse. “Purée, mais c’est la meilleure conjoncture qu’on puisse espérer ! Princesse ! […] On est exactement là où on doit être !”.
Saurons-nous vraiment si les comédiennes et comédiens du parc sourient derrière leurs masques ?
Un court-métrage aux allures farcesques inoffensives, qui se révèle finalement très acerbe.

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