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Capote percée d’Adriana da Fonseca

Publié le 25/05/2018 par David Hainaut / Catégorie: Critique

Ce monde merveilleux

Révélée l'an passé en tant qu'actrice dans l'OVNI Even Lovers Get The Blues, qui lui a valu, dans la foulée, une nomination aux Magritte, Adriana da Fonseca se dévoile à présent comme réalisatrice : Capote Percée, son premier court-métrage, a suscité une belle attention lors du dernier Brussels Short Film Festival.

Sélectionné parmi les trente-quatre films – sur plus de 400 inscrits (!), un record - de la compétition nationale du récent Festival du Court-Métrage de Bruxelles, 21e du nom et désormais « qualifiant » pour les Oscars, Capote Percée, premier film réalisé sur fonds propres, y a pleinement justifié sa place, en recevant un accueil particulièrement vibrant, lors de sa première projection.

Ceux qui auront remarqué sa palette – notamment – dans Even Lovers Get The Blues le savent, Adriana da Fonseca fait partie des comédiennes belges francophones à suivre. Révélée sur le tard - en tout cas, sur grand écran - après une déjà longue expérience sur les planches, cette jeune trentenaire discrète, outre confirmer d'évidentes qualités de jeu, ajoute donc une corde à son arc en démontrant qu'elle sait aussi manier la caméra, puisque Capote Percée, film dans lequel elle tient le premier rôle, a constitué pour beaucoup une petite surprise – voire un coup de cœur – lors de l'événement bruxellois.

Durant vingt-quatre minutes, son histoire se déroule intégralement dans une cour de récréation. Surnom affable attribué par ses comparses de classe, Capote Percée (Adriana da Fonseca donc, enlaidie au maximum pour l'occasion), look douteux et grosses lunettes, passe son quotidien à se réfugier dans ses lectures, à rêver d'un amour secret et surtout, à se plonger dans des utopies l'empêchant de sombrer. Car conspuée par ses congénères, absolument tout est là pour l'anéantir, tant physiquement que psychologiquement, entre coups, crachats et insultes. Mais sans doute a-t-elle depuis longtemps saisi qu'elle n'était qu'un malheureux réceptacle de frustrations – voire, du mal-être – de ce petit groupe qui l'entoure.

Particularité du film : sans que l'on y prête réellement attention, tant l'interprétation d'ensemble sonne juste, les adolescents sont interprétés par de jeunes adultes, parmi lesquels Séverine Porzio, une révélation d'ELGTB, à nouveau excellente, ici (en «amie» peste). Mais malgré la dureté du sujet – et de l'une ou l'autre scène -, le drame parvient à se mêler adroitement à l'émotion et même l'humour, avec un numéro musical assez anthologique. Scotchant jusqu'au générique final pour le moins original, Capote Percée, signé sans concession ni prétention, plaît ou déplaît, émeut ou non, dérange parfois, mais, à l'instar de son titre, réussit à ne laisser personne indifférent. Si le cinéma existe aussi pour susciter des débats, c'est alors là sans doute son principal atout.

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