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Dans le silence d’une mer abyssale de Juliette Klinke

Publié le 14/10/2021 par Bertrand Gevart / Catégorie: Critique

Lors du BSFF à Bruxelles, nous avons retrouvé en compétition nationale Dans le silence d’une mer abyssale, le dernier court-métrage documentaire de la réalisatrice Juliette Klinke. Entre récit personnel et interrogations sur l’invisibilisation des femmes dans l’histoire du cinéma, la réalisatrice nous emmène dans un voyage sensoriel, flottant et poétique à travers les images qui ont bercé sa cinéphilie et son nouveau musée imaginaire.

 
Dans le silence d’une mer abyssale de Juliette Klinke

Le film débute par une annonce qui nous indique que le film est construit par des morceaux d’autres films. D’emblée, la réalisatrice nous emmène vers une politisation des images, celle de la reprise de plans pour reformer une autre histoire.

Immédiatement une voix surgit sur un plan d’une pellicule abîmée et retravaillée et nous dit : « Qu’est-ce qui est digne de mémoire ? Qui détermine ce qui est digne de mémoire ? ». La voix-je de la réalisatrice s’interroge sur cette histoire du cinéma et ce qu’elle renferme comme idéologie à travers ce qui est digne d’être retenu ou non, digne d’être transmis ou non. Juliette Klinke se lance alors dans ses souvenirs qui voguent au-dessus des images, depuis son enfance jusqu’à l’école de cinéma et interrogent les plans, les séquences, les détails présents dans les images qui ont bercé et construit sa cinéphilie. La réalisatrice opère un glissement, du personnel vers le politique, en ne montrant plus que des femmes dans les images tout en revenant sur un constat édifiant, que les récits incluant des femmes sont le plus souvent réalisés par des hommes que les femmes ont été coupées de leur identité narrative, dépossédées du pouvoir de se raconter en tant que collectivité et sujet alors qu’elles furent présentes dès les débuts du cinéma, comme pionnières. Car malgré leur absence systémique et systématique, les femmes fréquentent le milieu du cinéma dès son apparition comme nous le rappelle Juliette Klinke. Alice Guy, Germaine du Lac, Maria P. Williams, autant de noms qu’il faut compter et dire afin de découvrir les représentations sociales des femmes et déconstruire notre propre savoir et envisager une autre histoire du cinéma. 

Finalement, la réalisatrice Juliette Klinke tisse des images et des souvenirs entre passé et présent et réinvestit les images comme un espace à conquérir pour générer un imaginaire qui est le sien et retrouver des codes, des images et une histoire qui intègrent des modèles féminins en rupture avec l’idéologie et l’esthétique patriarcale.

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