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ETWAS NEUES de Léo Guinet

Publié le 10/10/2020 par Bertrand Gevart / Catégorie: Critique

Le format amateur du super 8 s’invite dans ce documentaire réalisé par Léo Guinet dans le cadre de ses études à l’IAD. Le film raconte la réminiscence d’un homme qui retourne à Berlin en évoquant son voyage passé et sa maladie. Envisagé comme un journal filmé, l’image-mémoire surgit par fragments, comme des bribes de souvenirs, des étincelles d'élans vitaux qui l’ont gardé en vie. 

ETWAS NEUES de Léo Guinet

Redécouvrir le bruit de la ville, le silence, les voix d’enfants. Observer le monde, passivement, en retrait, sans bruit. Comme la première fois où il vit ces choses, il se souvient et se sent vivant. Les images d’un Berlin moderne en construction apparaît au fil des plans. La caméra se tourne rapidement vers les autres : enfants, amis, femmes, famille, ceux qui l’ont soutenu. Un an après la maladie, il trace un parcours existentiel dans la ville, un voyage intérieur. Le réalisateur évite l’écueil de la voix off, de la voix-je, de la présence dans le cadre, privilégiant l’utilisation de cartons qui racontent les effrois et les retrouvailles, les premières sensations. Le réalisateur construit son film dans une perspective non-narrative. Les éléments s’enchaînent sans qu’il n’y ait de lien, laissant toute liberté au spectateur de faire des associations. Il tente d’échapper à l’impossibilité d’un retour du passé en cherchant perpétuellement à le retrouver, et cette quête, il la partage avec nous. 

Son journal est donc envisagé comme une pratique radicale, seule à même, par la simplicité de son dispositif, d’être en prise sur le réel, dans une véritable hantise de la perte. Sur le plan esthétique, Léo Guinet privilégie l’expérience du moment, l’émotion qu’elle suscite plutôt que la perfection technique du rendu. Il saisit, comme une « main caméra », l’amour du fait ontologique que le réel existe. Il saisit dans ce qui se donne à voir pour la première et dernière fois. Saisir un sourire, une naissance, une danse, avant que tout ne tombe dans l’oubli. 

De toutes ces images du quotidien qui se succèdent, se dresse un autoportrait en cinéma pour mettre en évidence la nature fracturée du soi, se traduisant par des brefs instants d’existence, des répétitions, des réminiscences et des lieux traversés. Une expérimentation filmique intime où plane l’ombre de la maladie et de la mort et émerge la fragile captation de moments de vie dans ses états les plus anodins et les plus délicats. 

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