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Les naufragés de l’autocar de Liona Berliner

Publié le 25/04/2022 par Bertrand Gevart / Catégorie: Critique

Sélectionné au BSFF dans la compétition Next Génération, le film Les Naufragés de l’autocar réalisé par Liona Berliner nous raconte les violences et les discriminations du quotidien. Au moment d’embarquer à bord d’un bus long courrier, deux femmes noires sont accusées arbitrairement d’un excès de poids dans leur bagage engendrant la colère d’autres passagers.

Les naufragés de l’autocar de Liona Berliner

Un long travelling balaie l’ensemble des passagers attendant sur le trottoir. La caméra s’arrête çà et là devant des scènes loufoques, absurdes, consignant les rires de certaines  et certains et les inquiétudes des autres, l’attente, mais aussi les derniers baisers. À cette séquence, s’ajoute celle d’une employée de la ligne de bus Flexline qui regarde jalousement la liste de l’employé.e du mois, se rêvant sans doute à sa place comme une forme fantasmagorique mais réelle du monde du travail. La réalisatrice nous replonge dans l’arène de son film, parmi passagères et passagers, à l’heure du départ. Dans la file qui mène jusqu’à l’entrée du bus, l’employée et chauffeuse contrôle minutieusement plusieurs personnes, contrôlant avec le souci du détail chaque billet. Mais à l’arrivée des deux femmes noires, elle leur somme de payer un supplément pour deux sacs trop lourds à son goût.

Le film Les Naufragés de l’autocar bascule alors dans une dimension politique, où les naufragés de l’autocar sont aussi ceux du quotidien, ceux qui affrontent quotidiennement des refus, des discriminations, des contrôles aléatoires. Face à cette violence quotidienne, il y a celles et ceux qui se révoltent, et d'autres qui baissent la tête, celles et ceux qui sont témoins et qui agissent, et d'autres qui fuient. Mais ce silence assourdissant est néanmoins brisé par une passagère, Alix qui, très vite, s’oppose à la sentence irrévocable de la chauffeuse et prend la défense des deux femmes noires qui décident de monter à bord. Finalement, cette micro-histoire que déploie la réalisatrice Liona Berliner nous renvoie à notre propre comportement face aux discriminations du quotidien, à nos non-actions, à nos silences, à nos regards détournés face à une agression. Cette micro-histoire prend toute sa puissance lorsque la figure de l’autorité dictant les règles d’une société capitaliste et dominante est finalement renversée et où la foule passive devient un raz-de-marée agissant et critique.

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