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Les Yeux grands ouverts de Pierre Bouquet

Publié le 09/09/2022 par Nastasja Caneve / Catégorie: Critique

Et si un jour on perdait la vue, quelles images voudrait-on imprimer à tout jamais dans notre cerveau ? Que voudrait-on voir pour ne jamais l’oublier ? Pour en garder une trace tangible, ineffaçable ? C’est le questionnement d’Olivier qui apprend, à 35 ans, qu’il est susceptible de perdre la vue d’ici cinq ans.

Les Yeux grands ouverts de Pierre Bouquet

Quand on demande aux enfants ce qu’ils voudront faire plus tard, certains répondent astronautes, policiers, d’autres, acteurs, architectes. Olivier, lui, voulait être vétérinaire pour baleines. Vaste projet. Mais, ses rêves marins se sont rapidement dissipés après une expérience traumatisante à la piscine alors qu’il avait huit ans. Ne voulant pas renoncer à son envie, il vainc ses peurs et s’inscrit à un cours d’apnée. À force de persévérance, Olivier plonge, sans crainte, descend, descend pour s’approcher au plus près d’un ballet majestueux de raies mantas.

C’est ce parcours du combattant que Pierre Bouquet (Mourad et Sophie, Route Mer), formé initialement au droit de l’environnement et à l’IAD ensuite, décide de filmer dans Les Yeux grands ouverts. On embarque sur un bateau aux Maldives en compagnie d’Olivier qui s'apprête à ouvrir les yeux à tout jamais, à faire un arrêt sur image des profondeurs.

Le documentaire oscille entre témoignages du protagoniste, séances d'entraînement, images sous-marines, celles que nous aussi garderont gravées. On comprend la fascination pour le monde sous-marin, Jean Painlevé avait merveilleusement ouvert la voie. Ici, il ne s’agit pas de documentaire scientifique mais plutôt d’une ode à la vie marine, un tableau vivant aux couleurs chatoyantes, aux mouvements chorégraphiques de la faune sous-marine, d’une beauté secrète, inaccessible. Olivier prend place naturellement dans ces profondeurs, s’intègre, se fond dans la masse bleue.

Ce n’est pas la perte de la vue qui est au centre du documentaire mais plutôt la volonté indéfectible d’un homme qui réalise un rêve d’enfant même si tout semble l’en empêcher. Le documentaire pose aussi la question de ce que le cinéma laisse comme héritage pour celles et ceux qui voient mais qui ne verront jamais. Le cinéma comme trace, comme images immortelles. 

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