Présenté en première mondiale au UK Asian Film Festival, Minimum de la réalisatrice belgo-américaine Rumana Molla est une production légère dans sa forme mais puissante dans son fond. Un premier film empli d’une énergie bienveillante et communicative malgré son sujet difficile, traité avec finesse par une réalisatrice aussi à l’aise derrière que devant la caméra.
Minimum de Rumana Molla
Née de parents bengalis aux États-Unis, Rumana Molla grandit à Bruxelles tout en aspirant à une carrière d’actrice Bollywoodienne. Un rêve qui devient réalité en 2014, puisqu’elle fait ses débuts sur grand écran dans Ek Villain. C’est ensuite entre le cinéma, la télévision et les web-séries qu’elle construit sa carrière non sans embûches, mais toujours avec la même énergie. Avec Minimum, la comédienne écrit et réalise ici un film intimiste, que l’on sent partiellement inspiré de sa propre expérience de vie entre trois continents.
Mariée au travers d’une union arrangée, Fauzia (Rumana Molla elle-même) arrive en Belgique et se retrouve séquestrée par sa belle-mère Ruxana (Geetanjali Kulkarni). Petit à petit, elle découvre que son mari Ali (Namit Das) n’est pas l’homme qu’elle pensait épouser, et que ce mariage n’est qu’un tissu de mensonges. Alors que tout espoir semble avoir quitté Fauzia, elle parvient à retrouver du sens à sa vie au travers de l’amitié qu’elle développe avec Laurie (Saba Azad), qui lui enseigne le français à domicile. Une complicité qui permettra à Fauzia d’envisager le futur avec plus qu’une simple fatalité.
De ce sujet complexe et rude, Molla tire un film d’une beauté simple sur la sororité, l’entraide et le respect de la différence. D’abord enfermé dans l’atmosphère oppressante d’une maison sans issue, Minimum nous fait vivre la libération progressive de son personnage à travers une ouverture des décors et des espaces, et nous emporte avec Fauzia à la suite de Laurie et de son charisme magnétique. Sur les bords du fleuve, ce qui devait n’être qu’un exercice de prononciation devient un jeu et un moment de complicité intense et drôle, respiration ô combien attendue pour la protagoniste comme pour nous. Avant que l’étau de la belle-mère ne se resserre à nouveau sur elle. Pour autant, Minimum refuse le manichéisme en dépeignant Ruxana comme une mère à bout de force, dont la manipulation infâme est un dernier recours auquel - on le perçoit dans le fin jeu de l’actrice Geetanjali Kulkarni - elle aurait souhaité ne jamais se résoudre. Appuyé par la performance de l’acteur Namit Das, touchant dans son rôle d’Ali, le film dépeint un monde où la résignation fait petit à petit place à la résilience, grâce à la volonté de Fauzia et sa soif de vivre pleinement.
Le spectateur attentif ne pourra s’empêcher de se demander pour quelles raisons - sans doute financières - Minimum a été majoritairement tourné en Serbie plutôt que dans le plat pays qu’il met en scène. Mais il est intrigant de se voir ainsi représenté, et cela a le mérite de remettre en perspective notre unicité et ce qui fait la nature de la Belgique en tant que territoire et entité à l’international. Car comme nous le montre de manière facétieuse ce film simple mais touchant, la Belgique peut parfois se résumer à quelques frites, une gaufre chaude, et une bonne bière.