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Olivier Smolders a reçu l’Aigle d’Or International au Aguilar Film Festival

Publié le 05/12/2025 / Catégorie: Brève

Olivier Smolders, l'un des cinéastes belges les plus reconnus et internationaux avec plus de trois décennies de carrière, a reçu le 3 décembre l’Aigle d’Or International du Aguilar Film Festival. Ce festival, l’un des plus importants festivals de courts-métrages en Espagne, a ainsi mis en valeur l’œuvre d’un auteur culte dont le cinéma a exploré la relation entre littérature, peinture et cinéma depuis le milieu des années 1980.

Olivier Smolders a reçu l’Aigle d’Or International au Aguilar Film Festival

Une filmographie marquée par l’intensité et l’expérimentation

Smolders comptait 19 films à son actif, avec une nette prédominance du court métrage. Son style cinématographique reflétait à la fois sa formation de philologue et l’influence d’un environnement familial artistique — un père sculpteur et un frère peintre. Ses films partaient souvent de sources littéraires et présentaient une forte composante picturale, abordant des thèmes allant de la spiritualité et de la mémoire à la violence, la folie et l’érotisme.

« C’est toujours agréable de sentir que le travail que l’on fait est apprécié, surtout quand on réalise des films qui ne sont pas faciles à recevoir pour le spectateur. J’ai souvent abordé des sujets difficiles : la violence, la mort, mais aussi la vie et le bonheur. Les projeter tous ensemble demande un peu de courage au public. J’ai donc été heureux de partager cela ici », affirmait le cinéaste.

Parmi ses œuvres les plus reconnues figuraient le court métrage Adoration (1987), qui avait circulé dans des festivals du monde entier, et le diptyque La Philosophie dans le boudoir et Ravissement (1991), particulièrement apprécié dans le monde francophone. Avec le début du XXIᵉ siècle, Smolders avait élargi son registre thématique et formel, explorant le documentaire et réalisant son unique long métrage de fiction, Nuit noire (2005).

L’expérience d’Aguilar de Campoo

Pour lui, cette visite représentait une occasion unique de montrer l’étendue de son œuvre : « J’ai réalisé une bonne quinzaine de films, et il n’est pas courant d’avoir l’occasion de les montrer tous ensemble, car cela couvre de nombreuses années de travail.»

Lors de cette édition, en plus de recevoir le prix, Smolders a inauguré un cycle rétrospectif qui a projeté treize de ses films entre le 3 et le 5 décembre, incluant des titres récents tels que La Légende dorée (2015), Axolotl (2018) et Masques (2022). Il a également planté un arbre à Aguilar, suivant la tradition des hommages rendus à des cinéastes internationaux, dans le cadre de l’initiative du festival intitulée : Arbres et Étoiles. Aguilar de Campoo, Ville de Cinéma et de Nature. 

Un cinéma contemplatif dans un monde accéléré

À une époque où les images sont consommées très rapidement, Smolders a conservé un rythme délibérément lent et contemplatif : « Le monde peut s’accélérer autour de moi ; moi, je continue à me dépêcher lentement ». Bien qu’il ait expérimenté de nouveaux outils comme l’intelligence artificielle pour son dernier film, il assurait que sa manière de créer n’avait pas changé : il gardait le même rythme, ni plus rapide ni plus lent que dans ses projets précédents.

La situation du court métrage en Belgique

Smolders avait pu développer sa carrière grâce à l’ouverture du cinéma belge aux formes expérimentales : « La Belgique est assez ouverte à des formes d’expression artistique très variées. On peut y faire des œuvres courtes, longues, moyennes, des documentaires proches de la fiction, des fictions proches du documentaire. C’est un terrain très expérimental. Je n’ai donc pas eu beaucoup de difficultés à construire une carrière avec des courts-métrages, car cela n’a rien d’étonnant en Belgique ». 

Le cinéma belge se distingue par sa diversité et sa liberté créative : « Je pense que la force du cinéma belge est d’être décloisonné. C’est un cinéma ouvert à beaucoup d’expériences, avec moins d’obligations de se plier à un genre précis. Il existe plus de possibilités de faire des œuvres singulières, parfois étranges. Peut-être qu’une partie du succès à l’étranger vient de là : beaucoup de films belges sont originaux et particuliers ».

Références et cinéma récent

Parmi ses références les plus proches, Smolders évoquait un professeur de cinéma peu connu : « J’ai récemment terminé un petit livre en hommage à un de mes anciens professeurs de cinéma, un cinéaste nommé Edmond Bernhard. Il n’a réalisé que cinq courts-métrages, mais je garde un excellent souvenir de son enseignement et j’aime beaucoup ses films. Pour moi, c’est une sorte de père d’adoption ».

Il citait également des films qui l’avaient marqué par leur sensibilité poétique : « Je l’ai revu récemment — mais ce n’est pas récent — Vita brevis, un moyen-métrage d’environ quarante minutes réalisé par Thierry Knauff. C’est un film sur la vie très brève des éphémères, des insectes qui naissent à la surface d’une rivière et ne vivent que quelques heures. Un film poétique sur leur existence ».

Héritage et rétrospective au AFF

La rétrospective organisée par le AFF a permis au public de découvrir l’ampleur de l’œuvre de Smolders, un cinéma alliant rigueur esthétique, intensité thématique et liberté créative. Ses films témoignent d’un engagement envers le temps, la contemplation et la complexité de la condition humaine, offrant aux spectateurs la possibilité de plonger dans un univers visuel et narratif unique, où chaque image est soigneusement construite et chaque thème exploré avec audace.

Avec l’Aigle d’Or, Aguilar de Campoo a reconnu non seulement un cinéaste, mais un créateur qui continue d’influencer la perception du court métrage contemporain, démontrant que l’intensité et la poésie cinématographique peuvent coexister avec le temps et la patience nécessaires au bon cinéma.

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