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The Flats Alessandra Celesia, 2024

Publié le 10/02/2025 par Drossia Bouras / Catégorie: Critique

"L’art peut aider à guérir, constituer une manière positive de gérer les traumatismes" Alessandra Celesia

Prix du jury au festival Cinéville, en janvier 2025, Premier prix au sixième festival Docs Ireland, en juin 2024, The Flats de Alessandra Celesia se situe à Belfast, dans le quartier du New Lodge, une enclave catholique, à la limite du centre-ville.
Alessandra Celesia, réalisatrice italienne, a longtemps travaillé dans le théâtre comme comédienne et metteuse en scène avant de se lancer dans la réalisation. Ses créations ont pour centre d’intérêt les gens dans toute leur humanité et fragilité. 

The Flats Alessandra Celesia, 2024

C’est là que vit Joe Mc Nally, un vieil homme hanté par le conflit qui a opposé pendant plus de trente ans, de 1968 à 1998, les loyalistes (principalement protestants) aux républicains (majoritairement catholiques). Alessandra Celesia suit Joe, républicain catholique convaincu, traumatisé par le souvenir de la mort de son oncle, tué par les loyalistes, à l’âge de 17 ans, pendant le conflit nord-irlandais. Son oncle Cocke a été abattu d’une balle à l’arrière de la tête. Celle-ci est ressortie par le nez. Joe, qui avait 9 ans, ne se souvient que du pansement sur le nez pendant la veillée funéraire. Il est cependant marqué par cette scène qui continue de le hanter. Joe voit en thérapie Rita Overend, une conseillère qui travaille pour une association de prévention du suicide. Elle accompagne Joe dans un voyage de remémorisation des évènements pour faire revivre le passé et remonter à l’année fatidique de 1975, année où son oncle est mort. Un cercueil est utilisé comme décor de la reconstitution. Joe est aidé dans cette exploration par d’autres membres de la communauté catholique, impliqués aussi dans ce parcours émotionnel : un jeune garçon qui joue son rôle, Solène, Sean, Angie et d’autres voisins revisitent avec lui ses souvenirs personnels, mais aussi collectifs. Les blessures, toujours à vif, montrent l’étendue de l’impact psychologique du conflit sur plusieurs générations.

La violence domestique, les abus de drogues et d’alcool, les trafics en tous genres sont une réalité que la cinéaste n’a pas voulu occulter, tout en laissant une place belle à la chanson et aux scènes d’humour.

Alessandra Celesia use du procédé de reconstitution des scènes pour faire revivre le passé. Elle crée un espace cinématographique qui mêle passé, présent et documents d’archives.
Les descriptions des évènements sont émouvantes, mais aussi parfois fort drôles. La vie est là, avec ses moments de joie et d’autodérision. Grâce aux liens de confiance et d’amitié qu’elle a instaurés, elle brosse un tableau authentique et respectueux des habitants de ce quartier, leur donnant une note d’espoir et de résilience.

La réalisatrice, dont la famille du mari est issue du quartier, conclut par ses mots lors d’une entrevue donnée à Cineuropa le 9/07/2024 : « Si les films à eux seuls ne suffisent pas nécessairement à inspirer des changements significatifs, j’espère que The Flats instillera de la fierté dans la communauté de New Lodge ».

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