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Bref 107

Publié le 15/06/2013 par Jean-Michel Vlaeminckx / Catégorie: Livre & Publication

Central(e) Godard

Bref, la revue des courts métrages de cinéastes dont certains vont passer au long, favoriser l'émergence de jeunes cinéastes et les faire dialoguer avec leurs aînés, est, pour ces raisons, une revue passionnante. Le numéro 107 de Bref sort un dossier sur Jean-Luc Godard. Ceux qui l'aiment et ceux qui le détestent. Chacun ses arguments. Monsieur Jean-Luc dialogue avec les uns et avec les autres lors de quelques entretiens imaginaires. Michel Chion intitule son article Une façon de ne pas aimer Godard. On y découvre que Chion a écrit aux Cahiers du cinéma (1981-86) une revue de godardolâtres avec, comme seul film pendant cette période qui lui ait plu, Je vous salue Marie, le seul qui n'était pas aimé dans ce mensuel du cinéma. Contradiction ou paradoxe ?

Bref 107

Jacques Kermabon, le rédacteur en chef de Bref, préfère voir en JLG un poète plutôt qu'un essayiste. 
Luc Moulet, cinéaste qui collabore à Bref, Positif et, dès 1956, aux Cahiers du Cinéma divise l'œuvre de Godard en trois périodes. Entre 1957-1967, la période centrale (de À bout de souffle à La Chinoise), ensuite, la période politique ou situationniste (de Vent d'Est à Tout va bien) et enfin, la période basée sur le montage comme élément fondamental (de Sauve qui peut (la vie) à Socialisme). Moulet a aussi une jolie formule lorsqu'il écrit que Godard cherche à se faire plaisir et non à communiquer.
Un entretien intéressant entre JLG et Jean-Pierre Beauviola dessine, déjà en 1974, l'espace de l'évolution vers le numérique, un processus qui a démarré avec les vieilles VHS. Il suffit de remplacer "caméra Super 8" par "smartphone" et le même débat entre cinéastes cinéphiles et réalisateurs innovants roule dans les mêmes sentiers. Ce dialogue inédit part d'une bande sonore (K7 vidéo) restée sur une étagère depuis 39 ans et découverte par Isabel Prim lors du tournage de Le Rouge et la noire; l'un de ses courts métrages qui s'est construit autour du personnage de Beauviola, créateur de la caméra « Aaton ». Cela nous permet de connaître le dernier outil en très haute définition qui s'intitule la « Delta Penelope » (caméra entièrement numérique et non plus hybride comme la précédente caméra pellicule/numérique : Penelope/35mm/digital).
Un court texte de Thierry Knauff, lettres blanches sur fond noir, remercie Godard pour son cinéma.
L'esprit d'escalier, nouvel opus de Michel Chion, titre la suite de son feuilleton : la lumière à vue, c'est-à-dire la lumière à l'intérieur du cadre plutôt que la lumière additionnelle hors du cadre. Quelques exemples analysés dans Martin et Léa d'Alain Cavalier, Barry Lyndon de Stanley Kubrick.
Le DVD de la petite collection (pour les abonnés au magazine) nous offre quelques courts métrages dont 6 films de l'école cantonale de Lausanne. Parmi lesquels À quoi tu joues ? de Guillaume Saunier, rencontre amoureuse avec un côté nouvelle vague tchèque des années 60 (noir et blanc) et Mademoiselle Kiki et les Montparnos, film d'animation très amusant sur Kiki (pseudonyme de Alice Ernestine Prin), une demoiselle qui, dans l'entre-deux guerres, a inspiré beaucoup de peintres (Utrillo, Foujita, Modigliani, Kisling, Man Ray). Modèle, muse et amante, elle avait une coiffure au bol, des yeux soulignés au khôl, des lèvres peintes en rouge et une voix pleine de gouaille.

Bref est disponible à Bruxelles dans les librairies Darakan, Tropismes et Filigranes.