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Canto alla vita de Nathalie Rossetti et Turi Finocchiaro

Publié le 02/12/2016 par Serge Meurant / Catégorie: Critique

Le prologue au beau film de Nathalie Rossetti et de Turi Finocchiaro est essentiel pour comprendre qu’il s’agit d’un acte de mémoire, d’un héritage tout autant que d'un film sur un amour et la fin d’une vie. « Nous sommes dans la maison de mon père Giovanni, écrit le cinéaste, en ce lieu que nous appelons la chapelle où il aimait réunir ses amis autour de son piano. À sa mort, nous avons hérité de sa maison, de son piano et aussi de ses amis. Pour mon père, le plus proche est Raymond, il représentait pour lui l’incarnation de l’amour. »

Canto alla vita de Nathalie Rossetti et Turi Finocchiaro

Lorsque le couple de cinéastes fit la connaissance de Raymond, dans les années 80, celui-ci était atteint du sida. Il participait à un documentaire d’Omar Alqattan et militait pour la reconnaissance des droits des homosexuels. Il avait vécu ce tournage comme une manière de rompre sa solitude, de partager l’épreuve de la maladie et d’accompagner ceux-là qui n’osaient en faire l’aveu.

Le film est l’histoire de la rencontre entre deux hommes, Raymond et son compagnon qui porte le même prénom que lui, à la suite d’une séparation pour l’un, d’une solitude essentielle pour l’autre. Ils ont éprouvé, d’emblée, une attirance mutuelle, de l’amour.

Après avoir vécu ensemble une dizaine d’années heureuses, Raymond fut atteint d’une tumeur au cerveau. Il souhaitait que ses amis cinéastes accompagnent l’évolution de son cancer, témoignent de la lutte de son couple contre la maladie. « Quand on a la chance d’être deux, dit-il alors, la lutte est elle-même une source de bonheur. » Cette phrase, prononcée par un ami, a illuminé sa vie intérieure et lui a permis d’envisager avec sérénité l’opération qu’il va subir pour « donner un futur à l’amour qu’il porte à son compagnon. » Une première opération semble réussir, mais après une radiothérapie, la tumeur réapparaît, le défigure. Son compagnon l’accompagne à travers cette épreuve, et c’est très vite le moment des adieux. Celui-ci a lieu chez les cinéastes, intense de convivialité où s’expriment amour et tristesse. C’est en quelque sorte un retour à la première scène qui ouvre le film et évoque pour moi la Cène, où figure, en filigrane, le portrait du père de Turi, Giovanni.

L’animation de Nicolas Ligueri nourrit l’imaginaire du film et l’allège. Il le transporte en d’autres espaces, la plage et la mer, la montagne surtout. On retrouve les portraits des compagnons emportés par la verticalité heureuse de la montée du funiculaire. Deux silhouettes encordées s’éloignent dans l’immensité de la neige.

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