Ce qui nous restera d'Auschwitz

Julie est juive, ses grands-parents sont des rescapés du camp de concentration d'Auschwitz. Toute son existence a été marquée par la tragédie vécue par sa famille. Elle a connu des proches qui ont subi de ce qu’il s’est passé, elle a pu les interroger, voir leurs émotions. Mais le temps file et les derniers rescapés des camps sont en train de mourir.

De quelle manière la transmission de cette sombre période de l’histoire peut être effectuée sans témoins directs pour la raconter ? Comment ne jamais oublier ? Ce sont des questions qui ne quittent jamais l’esprit de Julie. Pour y répondre, c’est à Oświęcim en Pologne qu’elle va se rendre, avec Jonas Luyckx, le réalisateur. C’est dans cette ville que se trouvait le camp de concentration d’Auschwitz. Leur but est d’interroger les habitants sur leur rapport aux événements qui se sont déroulés là-bas. Ils veulent observer aussi de quelle façon la vie a pu continuer dans un lieu au passé aussi lourd.

Ce qui frappe en voyant ce documentaire, c’est sa manière de représenter l’avancée du temps. Cette ville a abrité l’enfer sur terre, les grands-parents de Julie y ont subi l’impensable. Maintenant, il y a des gens qui habitent dans ce même lieu, avec leurs maisons, leurs chiens, leurs boulots… Si les vieilles générations se souviennent encore, car elles y étaient, celles d’après commencent déjà à oublier. Beaucoup veulent fuir cette réalité, ils préfèrent détourner le regard, car vivre là-bas en sachant est trop difficile. Ils sont passés à autre chose.

Lors d’une séquence où Julie parle sur le bord d’une route, sa voix est partiellement masquée par l’arrivée d’une voiture. On se demande pourquoi ne pas avoir fait une autre prise, mais on peut supposer que c’est un choix volontaire. Car le simple fait de voir cette voiture passer et continuer son chemin tranquillement nous montre à quel point tout a évolué là-bas. Il s’agit d’une émouvante métaphore du temps qui passe.

L’un des passages les plus forts de l’œuvre est une cérémonie de mariage. Julie observe cette jeune femme, radieuse dans sa robe de mariée, attendant l’amour de sa vie. Le parallèle entre sa grand-mère dans son pyjama rayé et cette jeune femme dans sa robe de mariée est très fort. Cette scène est à la fois positive et négative, il y a quelque chose de beau qui s’en dégage, car il y a enfin de la joie dans un endroit qui a été marqué par l’horreur. Mais il y a aussi la tristesse de voir tous ces gens qui oublient de plus en plus leur histoire.

Ce qui nous restera d'Auschwitz est un documentaire très puissant. En moins d’une heure, il parvient à brillamment nous exposer son sujet et ses thématiques. L’émotion est présente tout le long de l’œuvre et la démarche de Julie Benegnos et Jonas Luyckx est très belle et courageuse.

Jules de Foestraets