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Chaos de Sébastien Petit

Publié le 15/12/2015 par David Hainaut / Catégorie: Critique

La fin d’un monde

Remarqué en 2014 grâce à Bowling Killers, un court-métrage de genre qui réalisa la prouesse d’être nommé aux Magritte, Sébastien Petit confirme l’étendue de son potentiel avec Chaos, un film traditionnel cette fois, parfaitement inscrit dans son époque.

 

Chaos de Sébastien PetitCette fiction de dix-huit minutes suit le parcours d’un quidam (Steve Driesen, le toujours impeccable acteur fétiche du réalisateur) qui, dans sa voiture, sillonne une autoroute vide, au milieu de nulle part. Quand tout à coup, tout s’arrête: radio, moteur de la voiture, éclairage public, portable, montre. Coincé, car orphelin des technologies dont dépend son quotidien, il se retrouve complètement seul, face à sa vulnérabilité.

Sujet apocalyptique traité avec finesse, le film anticipe avec un certain panache une réalité plausible: celle qui pourrait devenir la nôtre dans quelques temps, si ce monde dans lequel nous vivons ne change pas d’orientation. A savoir, celui où, malgré les alertes, presque tout reste encore pensé en termes de croissance économique et surtout, celui où nous continuons, à surexploiter les ressources disponibles.

Car cette réflexion – fédératrice - nous confronte de plein fouet à un futur que notre cerveau peine à imaginer, dans une sorte de déni naturel. Si la parabole met souvent mal à l’aise, le pessimisme ambiant n’est au final qu’une façade pour l’homme à l’éternel béret noir, qui reste avant tout un jeune papa. "Je suis quelqu’un d’optimiste. Mais je sais au fond de moi que mon fils ne pourra vivre comme ont vécu ses grands-parents. Moi aussi, d’ailleurs. Est-ce un leurre? Pas forcément. Le principal est d’en être bien conscient pour mieux amorcer l’avenir". Des changements vitaux espérés, qui s’expriment en filigrane à travers la voix-off anglaise d’un film particulièrement dense, comme "La civilisation matérielle va disparaître à coup sûr. Mais notre espèce survivra, différemment". Et qui pose les questions cruciales: jusqu’à quel point sommes-nous dépendants des technologies? Pour être heureux, faut-il avoir plus ou vouloir moins?

Remarqué pour la première fois lors du Brussels Short Film Festival en avril dernier, Chaos s’est dans la foulée vu sélectionner parmi les vingt courts-métrages annuels convoités du WBI (Wallonie-Bruxelles Images), lui valant d’être diffusé au marché des acheteurs à Cannes. Montré dans plusieurs festivals du monde entier (Angleterre, Etats-Unis, France, Grèce, Pologne…) il se retrouve dans la première sélection de courts-métrages du 1er Festival International du Film de Bruxelles. Par ailleurs, il a été acheté par France Télévision et la RTBF. Sans surprise.

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