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Cinéma wallon, cinéma de la crise ou crise du cinéma ?

Publié le 12/04/2011 par Dimitra Bouras / Catégorie: Livre & Publication

Cinéma wallon, cinéma de la crise ou crise du cinéma ?

cinéma et crise(s) économique(s)Comment se fait-il que les films belges francophones soient sociaux; certains plus, d'autres moins, mais toujours aux couleurs grisâtres de la poussière industrielle ? Pourquoi la crise économique a-t-elle une place de choix dans les histoires des cinéastes du sud du plat pays ? Les paysages portés à l'écran sont terrils, carcasses sidérurgiques, hauts-fourneaux et voies ferrées ? L'odeur âcre de la fumée qui s'échappe des colonnes de cheminées imprègne les plans panoramiques de la totalité des films wallons. Le département d'histoire des Facultés universitaires de Namur a eu le mérite d'oser poser ces questions et d’inviter cinéphiles et essayistes à débattre du sujet. Au grand étonnement des étudiants séminaristes qui découvraient l'ampleur de l'empreinte du passé sur grand écran, des tentatives d'explications ont été avancées. 
Partant du constat que de nombreux films belges (La Promesse, Eldorado, les Convoyeurs attendent, etc.) situent leurs intrigues dans un contexte de récession, que beaucoup prennent pour objet le déclin réel des industries du pays, évoquent la fermeture des charbonnages, les crises de la sidérurgie et les conditions de vie et de travail des ouvriers et de leurs familles, les intervenants se sont interrogés sur le(s) regard(s) que le cinéma porte sur la crise économique.
Les propos particulièrement intelligents et originaux échangés le 24 mars 2009 au cours de ce colloque ont été publiés par la très sérieuse maison d'édition Yellow Now. Un petit livre, au papier agréable au toucher, format idéal pour glisser dans la poche; 140 pages qui racontent la genèse du cinéma belge avec Henri Storck et Joris Ivens et leur film réalisé en 1933, Borinage, suivi par Déjà s'envole la fleur maigre de Paul Meyer, en 1960 puis Jeudi on chantera comme dimanche de Luc De Heusch, 1967, etc. Avec ces ancêtres-là, il est presque logique que le cinéma wallon, financé par les institutions pour son caractère pédagogique ou touristique, porte encore en lui l'héritage de ces monuments cinématographiques qui marquèrent l'histoire du cinéma.

Pour les non-originaires des villes industrielles du sillon Sambre et Meuse, la fascination esthétique pour la ferraille qui entaille la terre et le ciel peut être incompréhensible, mais il suffit d'observer les personnages des films contempler leur panorama pour admettre la nostalgie de leur regard.

Cinéma et crises économiques. Esquisses d'une cinématographie wallonne. Sous la direction d’Anne Roekens et Axel Tixhon, 144p. Editions Yellow Now avec les Presses universitaires de Namur.