Cinergie.be

Fritzi : Histoire d’une révolution de Matthias Bruhn et Ralf Kukula

Publié le 04/11/2019 par Nastasja Caneve / Catégorie: Critique

Quand l’histoire fait l’Histoire

30 ans plus tôt, l’Europe était divisée. Deux gros blocs, séparés par un gros mur de gros béton. Infranchissable. Celui qui s’y risquait, risquait sa vie. Une prison à ciel ouvert érigée en plein cœur de l’Europe. Et, puis, le 9 novembre 1989, la vie de nombreux citoyens bascule. Boum. Le mur explosé, détruit, effacé. Voilà le contexte dont s’emparent les réalisateurs allemands Matthias Bruhn et Ralf Kukula dans leur coproduction entre l’Allemagne, la Belgique, le Luxembourg et la République tchèque, Fritzi, Histoire d’une révolution, sorti 30 ans après ce moment historique.  

FritziLes films sur le sujet abondent. L’originalité de celui-ci ? Il s’adresse aux enfants. Directement, sans faux semblant. Basé sur le livre éponyme pour enfants d’Hanna Schott, le scénario de Beate Völcker met en scène la petite Fritzi, une gamine de 12 ans, insouciante, joviale qui profite des beaux jours avec son amie Sophie, dans une cabane en bois, le ciel au bout des doigts. Mais, un jour, Sophie part en vacances en Hongrie avec sa famille et elle confie son chien Sputnik à son amie. Les jours passent, Fritzi rentre à l’école sans Sophie… 

Pourquoi n’est-elle pas là ? Pourquoi reste-t-elle en vacances ? Pourquoi la Hongrie ? Pourquoi ne pas pouvoir lui ramener son fidèle compagnon ? Pourquoi ? Pourquoi ? Autant de questions auxquelles tente de répondre l’intrépide Fritzi. Jeune blondinette que rien n’arrête. Ni sa vilaine maîtresse d’école, ni ses condisciples de classe qui se plient sans broncher aux règles en place, ni les agents de la Stasi rabougris. Elle fera tout, le cœur vaillant, pour ramener Sputnik auprès de sa maîtresse. 

Ce qui est bien avec Fritzi, c’est que les réalisateurs s’emparent de l’Histoire, la grande, celle des ouvrages de référence, par le biais de l’histoire, la petite, celle d’une amitié que rien n’arrête. Rien de tel pour expliquer aux enfants ce qui s’est réellement passé là-bas, 30 ans plus tôt. L’héroïne fait sensation, elle s’immisce dans l’actualité, la vive, celle des rues, celle du peuple qui se soulève, sans heurt. Le spectateur en herbe comprend comment un soulèvement populaire pacifique peut considérablement faire avancer les choses et renverser la situation, celle de l’Allemagne à la fin des années 1980 mais pas seulement. Une histoire parmi tant d’autres là où le pouvoir en place décide de séparer des êtres humains qui n’ont rien demandé. 

Matthias Bruhn et Ralf Kukula  ont opté pour un graphisme réaliste pour ce film qu’on pourrait qualifier de didactique. Le spectateur, enfant ET adulte, est plongé dans l’Allemagne de cette époque grâce aux décors chiadés, à la bande son référencée et aux extraits de journaux télévisés de l’époque. Cependant, les personnages, moins ancrés, permettent de déplacer le récit dans notre société actuelle où des milliers de réfugiés fuient leur pays et abandonnent, sans le vouloir, leurs amis et leur famille. Un long-métrage qui parle d’hier et d’aujourd’hui, de l’utilisation et du pouvoir des médias et, plus simplement, d’une amitié sans borne, surtout pas un mur blindé. 

Tout à propos de: