Histoire et Cinéma d'Antoine de Baecque
Publié le 04/03/2008 par Jean-Michel Vlaeminckx / Catégorie: Livre & Publication
Histoire et Cinéma
Dans l’excellente collection Les petits Cahiers des Cahiers du Cinéma, Antoine de Baecque, ex-rédac'chef des Cahiers du Cinéma et des pages culturelles de Libération nous offre Histoire et Cinéma. Si le roman a été la forme de l’histoire au XIXème siècle, le cinéma l’a été pendant le siècle suivant. Cela démarre dès la fin du siècle avec les vues du cinématographe Lumière. Devenant, dès ses débuts, « un outil de compréhension de la réalité, sans cesse repris, recyclé, comme une vision du monde ». Depuis toujours il est l’identité de l’Amérique (voir Naissance d’une nation, 1914 et Intolérance, 1915 de David Wark Griffith) et de la Russie soviétique à travers des films mythiques comme Le Cuirassé Potemkine ou Octobre. Mais aussi, dès la fin du XIXème siècle, en France avec le procès du capitaine Dreyfus reconstitué par Georges Méliès. « Car en forgeant ses propres procédés visuels, ses effets, ses techniques, le cinéma est devenu la boîte à outils de l’histoire : le plan, le montage, la surimpression, le ralenti, le flash-back, le regard caméra, le carton d’intertitre ou encore le document comme archive ».
Retenons, plus proche de nous, Lanzman et Godard, comment filmer l’histoire. Cinéma et Shoah sont nés dans une ère semblable et appartiennent à une civilisation créée par l’Occident qui s’est entendue dans le monde entier. Claude Lanzman dans Shoah, son film de neuf heures, n’essaie pas de montrer mais de démontrer, parce qu’au nom de la vérité, il ne s’agit pas de faire jouir du spectacle de la barbarie. « Lanzman affirme qu’on ne peut ni reconstituer, ni illustrer, ni filmer l’extermination des juifs dans le camp de la mort, mais qu’on doit tenter de comprendre et de démonter "ce système d’élimination" en confrontant les témoignages des victimes et des bourreaux, non pas en les mettant face à face mais en les mettant "en réflexion dans l’histoire" par le montage. »
Pour Jean-Luc Godard, depuis L’arrivée du train à la gare de La Ciotat (1895) des frères Lumière, le cinéma est « l’autobiographie de tous, où un cinéaste cherchant sa raison dans son histoire, éclaire finalement les raisons de l’histoire, et tente même de la sauver en conférant au cinéma, qui l’a enregistrée, une responsabilité morale ». Ce qui a donné à Godard le désir de monter les Histoire(s) du cinéma, huit films de montage sur l’histoire du cinéma de 4 heures 24 minutes (Toutes les histoires, Une histoire seule, Seul le cinéma, Fatale beauté, La monnaie de l’absolu, Une vague nouvelle, Le contrôle de l’univers, Les signes parmi nous, édité en DVD par Gaumont). Car pour lui, le cinéaste est un historien privilégié.
Godard : « Mon idée de médecin de campagne ou de jardinier du cinéma, c’était qu’un des buts du cinéma était d’inventer ou de découvrir le montage pour pouvoir faire de l’histoire ».
Le livre d’Antoine de Baecque parle de bien d’autres réalisateurs et de leurs films. Son livre consacre la deuxième partie à des documents, découpages de séquence, entretiens, analyses pour ouvrir de nouvelles pistes au lecteur. Citons, Gance présente Napoléon à son équipe. Nuit et brouillard : filmer l’histoire c’est filmer le temps, avec un entretien avec Alain Resnais qui a réalisé son film en 1954.
Mais surtout Abraham Zapruder qui a filmé, à l’aide d’une caméra Super 8, le meurtre du président des Etats-Unis en 26 secondes de pellicule à la vitesse de 18 images 1/3 par seconde. John Fitzgerald Kennedy est assassiné à Dallas le 22 novembre 1963. L’assassinat de JFK et le cinéma américain, nous expliquent comment un home movie de 26 secondes a pu « constituer un moment fondateur des images du XXème siècle ». Il n’y a pas que Blow Out de Brian de Palma, un film hyper connu des cinéphiles et néo-cinéphiles, il y a aussi désormais, depuis les films lancés dans les années 60, d’Arthur Penn et Sam Peckinpah, une violence du meurtre comme explosion détaillée (souvent au ralenti-les 26 secondes de Zapruder images par images) filmée comme une interminable cérémonie ou de nombreux assassinats qui sont la répétition du meurtre fondateur. Sur un sujet déterminant dans un cinéma qui a fondé une nouvelle manière de montrer le monde et qui a influencé le cinéma d’action asiatique, et plus proche de nous, Olivier Stone, Quentin Tarantino, etc, il faut signaler, dans Panic 1, la revue de Jean-Baptiste Thoret, le dossier « le sang de l’Amérique » avec un texte passionnant de Don Delillo, l’auteur de Libra. Sur le film de Zapruder on peut lire : « ce film est devenu, pour nous, l’emblème même de l’incertitude et du chaos. L’instant bouleversant de la mort, les flous qui l’entourent, des taches, des ombres ».
Histoire et cinéma, Antoine de Baecque, Cahiers du cinéma, les petits Cahiers.
Godard : « Mon idée de médecin de campagne ou de jardinier du cinéma, c’était qu’un des buts du cinéma était d’inventer ou de découvrir le montage pour pouvoir faire de l’histoire ».
Le livre d’Antoine de Baecque parle de bien d’autres réalisateurs et de leurs films. Son livre consacre la deuxième partie à des documents, découpages de séquence, entretiens, analyses pour ouvrir de nouvelles pistes au lecteur. Citons, Gance présente Napoléon à son équipe. Nuit et brouillard : filmer l’histoire c’est filmer le temps, avec un entretien avec Alain Resnais qui a réalisé son film en 1954.
Mais surtout Abraham Zapruder qui a filmé, à l’aide d’une caméra Super 8, le meurtre du président des Etats-Unis en 26 secondes de pellicule à la vitesse de 18 images 1/3 par seconde. John Fitzgerald Kennedy est assassiné à Dallas le 22 novembre 1963. L’assassinat de JFK et le cinéma américain, nous expliquent comment un home movie de 26 secondes a pu « constituer un moment fondateur des images du XXème siècle ». Il n’y a pas que Blow Out de Brian de Palma, un film hyper connu des cinéphiles et néo-cinéphiles, il y a aussi désormais, depuis les films lancés dans les années 60, d’Arthur Penn et Sam Peckinpah, une violence du meurtre comme explosion détaillée (souvent au ralenti-les 26 secondes de Zapruder images par images) filmée comme une interminable cérémonie ou de nombreux assassinats qui sont la répétition du meurtre fondateur. Sur un sujet déterminant dans un cinéma qui a fondé une nouvelle manière de montrer le monde et qui a influencé le cinéma d’action asiatique, et plus proche de nous, Olivier Stone, Quentin Tarantino, etc, il faut signaler, dans Panic 1, la revue de Jean-Baptiste Thoret, le dossier « le sang de l’Amérique » avec un texte passionnant de Don Delillo, l’auteur de Libra. Sur le film de Zapruder on peut lire : « ce film est devenu, pour nous, l’emblème même de l’incertitude et du chaos. L’instant bouleversant de la mort, les flous qui l’entourent, des taches, des ombres ».
Histoire et cinéma, Antoine de Baecque, Cahiers du cinéma, les petits Cahiers.