Katniss Everdeen : Embraser son destin, nouvel opus de la Fabrique des Héros aux Impressions Nouvelles

Comme tout bon portrait, on commence par le croquis. Celui d’une femme que Chevallier recontextualise grâce aux propos de l’autrice. Entre les lignes, on comprend d’où est née Katniss, ce qui a nourri sa genèse. Derrière ces esquisses, l’univers de la saga se dévoile. La force de Suzanne Collins, c’est d’allier les mythes antiques et les tragédies grecques avec des pans entiers de notre histoire contemporaine. Plausible, trop crédible même, la dystopie qu’elle met en place heurte autant par sa cruauté que par son réalisme, hantée par les vérités dont elle s’inspire.

Au fil de son analyse, l’auteur nous emmène ainsi des républiques de Rome aux puits de charbonnage des Corons, d’un Capitole aux allures de la Berlin rêvée d’Hitler aux forêts de Sherwood ou de Brocéliande. Entre ces arbres qui bordent le District 12, Katniss est une déesse en devenir, une Diane chasseresse en gestation. Katniss est la somme des grandes femmes de l’Histoire qui l’ont précédée. Elle est Artémis, Juliet, et bien d’autres, tout en étant résolument ancrée dans son époque. Katniss est autant une icône féministe qu’une icône révolutionnaire, destructrice des ordres établis et briseuse des diktats autant genrés que politiques. Par ces aspects, elle en devient une icône moderne. Hollywood ne s’y est pas trompé. Le parcours initiatique de Katniss, la construction de son mythe est hautement cinématographique. Et l’humanité qui transpire de Jennifer Lawrence transcende le personnage. Le genre de figure qui, tant sur les pages que sur les écrans, quitte son médium pour devenir idole, moteur de changement. Ainsi en est-il de ce simple geste de Katniss, symbole d’une ancienne révolte qui deviendra révolution dans l'œuvre. Ce même salut qui prend vie dans les manifestations en Thaïlande en 2014, ou cette année en Birmanie. Katniss s’est incarnée. Sa rébellion a dépassé les frontières et les langues pour devenir universelle.

Difficile ici d’aborder tous les aspects passionnants du décryptage de l’auteur. Revenons peut-être simplement sur ce titre, Embraser son destin. Un trait d’esprit qui, comme la flèche de Katniss, a percé la barrière de notre curiosité et nous a enjoint à plonger entre ces pages. Et la dernière ligne achevée, il nous tarde de replonger dans l'œuvre originale et son pendant cinématographique. Pour ensuite revenir à cette analyse édifiante, les souvenirs frais, et le symbole du geai moqueur broché à notre poitrine.