La Abadesa (l’Abbesse) (2024), réalisé par Antonio Chavarrias, retrace la vie d'Emma, fille du comte Guifré de Barcelone, au début du IXe siècle. Destinée dès son jeune âge à la vie religieuse, elle devient abbesse de l'abbaye de Saint-Jean (abadia de Sant Joan de les Abadesses) à seulement 17 ans. Refusant de se plier aux conventions de son époque, cette abbesse audacieuse défie les pouvoirs religieux et politiques établis.
L’Abbesse - Antonio Chavarrias - 2024

Co-produite par Oberon Media (Espagne), Wanda Vision (Espagne) et Saga Film (Belgique), cette création plonge le spectateur dans la période troublée de la Reconquista, époque où les royaumes chrétiens du nord, dont la Catalogne, affrontaient les dirigeants musulmans d’Al-Andalus au sud, la Catalogne servant de frontière chrétienne face à l'expansion musulmane.
La légende raconte qu'en 897, lors d’un combat contre les troupes musulmanes près de Lérida, Guifré el Pilós, gravement blessé, aurait été visité par le roi Charles le Chauve. En hommage à sa bravoure, ce dernier aurait tracé quatre lignes rouges avec le sang de Guifré sur un bouclier doré, créant ainsi la senyera, futur symbole de la Catalogne.
Dans La Abadesa, Emma incarne une figure emblématique d’autorité féminine, défiant les normes patriarcales de son temps. Son leadership met en lumière les luttes pour l’émancipation des femmes, illustrant sa détermination à s'affirmer et à revendiquer son pouvoir dans un univers dominé par les hommes. Le film résonne puissamment avec les revendications contemporaines pour l'égalité des droits, soulignant l'importance de la voix et de l'autorité féminines, encore sous-représentées dans l'histoire. En explorant la vie d’Emma, L’Abbesse propose une réflexion sur la condition féminine, établissant des parallèles avec les luttes modernes pour l’émancipation et l'égalité.
Le film explore les relations de pouvoir au sein de l'abbaye, révélant des dynamiques complexes et souvent conflictuelles. Ces luttes sont mises en lumière par une mise en scène et une photographie qui renforcent l'atmosphère médiévale. Les costumes et les décors authentiques plongent le spectateur dans l'époque, tandis que les jeux de lumière accentuent les tensions entre les personnages et soulignent la sacralité de l'environnement. Les dialogues font écho aux dilemmes moraux et aux rivalités monastiques, rendant l’histoire à la fois captivante et poignante.
Antonio Chavarrias souligne : «Les germes du monde moderne ont été plantés à cette époque, ce qui donne à cette histoire une résonance forte aujourd'hui.» En plongeant le spectateur dans les luttes d'Emma et les tensions de l’abbaye, le film montre comment les rapports de pouvoir et les croyances d’alors influencent encore les conflits et visions actuels. L’Abbesse ne se limite pas aux thèmes de genre, mais aborde également les enjeux territoriaux, les confrontations religieuses et les chocs entre dogmes, mettant en lumière cette vision binaire héritée du religieux, qui divise entre le Bien et le Mal.
Ainsi, ce récit ancien révèle avec intensité que le passé continue de modeler notre présent.