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L’Ancre de Jen Debauche

Publié le 01/09/2025 par Malko Douglas Tolley / Catégorie: Critique

L’Ancre : immersion sensorielle dans l’expérience psychotique

Avec L’Ancre, Jen Debauche propose un film à la fois délicat et ambitieux, qui mêle récits de psychose, images sous-marines tournées par un cameraman spécialisé et exploration des paysages arctiques. En combinant documentaire et approche sensorielle, ce documentaire invite à une plongée dans les troubles de l’esprit, tout en interrogeant notre rapport à la mémoire, à la nature et à ce qui fait notre équilibre intérieur.

L’Ancre de Jen Debauche

Ailyn, Bruno, Guillaume et Florence ont fait l’expérience de la folie. Ils racontent leur traversée, leur moment psychotique, leur décompensation d’humain qui déborde. Dans le calme de son bureau citadin, une femme solitaire écoute leurs récits archivés sur des cassettes. 
Le film ne suit pas un récit classique. Il avance par fragments, impressions, superpositions. Témoignages, sons, textures d’image, paysages extrêmes : tout participe à une expérience où la folie est abordée non pas comme un sujet médical, mais comme une expérience intime, vécue de l’intérieur. Cette construction libre rend le film parfois déroutant, mais profondément immersif. Parmi les témoignages racontés et les pensées philosophiques évoquées, un témoignage comparatif entre la perception de la mort en Inde et en Europe est exemplatif de l’approche du film et de sa dimension spirituelle.
Les images sous-marines, très présentes, évoquent une descente dans les profondeurs de l’esprit, tandis que les paysages arctiques deviennent des espaces mentaux : vastes, silencieux, fragiles. Sans jamais chercher à expliquer ou simplifier, L’Ancre pose des questions essentielles. Pourquoi perd-on pied ? Comment tenir ? Qu’est-ce qui nous relie au monde ? Qu’est-ce que la folie ?
Jen Debauche rassemble ici le travail de sept années d’études des motifs de la folie, et nous livre un film bouleversant, à la croisée du documentaire et de la réflexion philosophique. Les images qu’elle a réalisées, caméra 16mm au poing, en haut du mat d’un vieux gréement voguant vers le pôle nord, nous poursuivent dans notre appréhension de la fragilité mentale.

 

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