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Les Têtes givrées de Stéphane Cazes

Publié le 15/03/2023 par Grégory Cavinato / Catégorie: Critique

Les montagnards sont las

Dans un collège au pied du Mont Blanc, les élèves adolescents d’une classe de SEGPA (accueillant les jeunes ne maîtrisant pas toutes les connaissances et compétences attendues en fin de primaire) ne s’intéressent à rien. Apathiques, paresseux, turbulents, mais également fragiles et sans estime de soi, ils ont pour la plupart beaucoup de mal à se concentrer sur leurs devoirs scolaires. Ils n’ont ni le swag ni la hype, mais ils ont le seum. Il leur manque le petit coup de pouce qui leur permettra d’envisager leur avenir de manière positive.

Les Têtes givrées de Stéphane Cazes

Ce coup de pouce arrive en la personne d’Alain Faillet (Clovis Cornillac), un professeur intérimaire, qui, pour les motiver et les faire rêver, organise une sortie dans les entrailles d’un glacier. Les adolescents y découvrent un monde d'une beauté à couper le souffle. Ou, comme ils le disent avec une grande justesse : « Trop bien ! ». Mais ils réalisent aussi qu’avec le réchauffement climatique, si rien n’est fait, ce glacier, comme beaucoup d’autres, pourrait disparaitre. A la vitesse actuelle, 90% des glaciers alpins auront disparu en 2100. « Trop chelou ! » Mais pour l’instant, ils sont toujours là ! C’est donc contre l’avis de tous, mais entraînés par leur professeur rebelle, qu’ils vont se lancer dans un projet fou : empêcher le glacier de fondre en collectant des bâches pour le recouvrir. D’abord dépassés par l’ampleur de la tâche, ils reprennent du poil de la bête grâce à la ténacité d’Alain, un homme brisé par la mort de sa fille, qui, de son côté, va retrouver l’inspiration et un peu de joie de vivre au contact de ces « boloss ». 

« Avec eux, il ne faut pas mettre la barre trop haut ! », voilà le conseil éclairé que la directrice de l’école donne à Alain avant qu’il ne rencontre ses élèves. Déjà sacrifiés, oubliés par leurs aînés démissionnaires, cette douzaine de jeunes vont prouver qu’ils ne sont peut-être pas aussi irrécupérables qu’ils en ont l’air, quitte à poser leurs premiers actes de désobéissance civile. 

Un professeur idéaliste ayant perdu son mojo, qui monte la tête à ses élèves, leur donne confiance en eux et leur fait croire à des rêves que la société juge impossibles, au mépris des lois et des autorités? Aucun doute, Stéphane Cazes et ses scénaristes ont vu Le Cercle des poètes disparus. Le film de Peter Weir sert de structure aux Têtes givrées, qui suit donc une formule archi-connue, mais néanmoins efficace : choc des cultures (ces élèves au français épouvantable se moquent des expressions vieillottes de leur professeur), apprentissage de l’entraide et du travail en équipe, combat impossible, déceptions en série, puis l’inévitable fin heureuse qui fera chaud au cœur à un public pas trop exigeant… 

Tout ça, bien entendu, est terriblement formaté, naïf, gentillet, voire un peu manichéen (le maire et son conseil municipal diabolique, les vilains qui consomment du plastique…) et déborde de bons sentiments, comme dans la plupart de ces comédies familiales françaises davantage destinées à être vues sur un écran de télévision un dimanche après-midi que dans une salle de cinéma. Néanmoins, on ne doute jamais des bonnes intentions du réalisateur et de son casting. Si, malgré ses limites évidentes, Les Têtes givrées pouvait faire prendre conscience de la cause écologique et inspirer certains jeunes spectateurs à se démener pour faire avancer le combat, il aurait, quoi qu’on en dise, atteint sa cible !

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