L'affaire Lumumba fut vécue en Belgique comme l'épisode le plus douloureux de la décolonisation. Chez les bourgeois, on se souvient encore de la "haine hystérique" soulevée contre "ce nègre à barbiche de chèvre".
A gauche, l'indignation provoquée par le traitement réservé au "frère socialiste, immolé pour cause de communisme", prévaut encore.
Il a fallu près de quarante ans pour qu'on ose enfin s'interroger officiellement sur la part de responsabilité des autorités belges dans ce monstrueux assassinat. Et au Congo, les répliques des convulsions qui agitèrent le pays sont toujours discernables dans ses déchirements d'aujourd'hui. Aussi, quand Raoul Peck vint en Belgique chercher aide et finances pour réaliser une fiction qui raconte l'arrivée au pouvoir, la déchéance et la mort Patrice Lumumba, il fit preuve d'un certain courage, tout comme d'ailleurs ceux qui choisirent de lui accorder leur confiance. Inutile de dire que, dans nos grises contrées, le film était attendu au tournant. Naviguant habilement entre tous ces pièges, le résultat est original et... plutôt surprenant.