Sortant des sentiers battus du cinéma belge, Julien Henry s'aventure sur le terrain du thriller néo-noir avec Lynx, un court-métrage haletant dans le milieu méconnu des courses de voiture. C'est à Comines-Warneton que la réalisateur pose sa caméra pour capter le quotidien détruit d'un couple de coureurs ayant récemment vécu un drame familial. Endeuillés et résignés, tout change lorsqu'ils parviennent à remettre la main sur le coupable. Marie (Erika Sainte) et Tony (Wouter Hendrickx) décident alors de régler son sort avec la seule justice qu'ils jugent valables, celle du circuit automobile.
Lynx de Julien Henry
Charnel, au plus près de ses personnages, le film démarre d'emblée au cœur d'une action dure, brute, qui sent le cambouis et la tôle cabossée. Une mise en jambe caméra au capot, micros dans les moteurs, plongeant directement le spectateur dans l'ambiance très particulière d'un monde belge underground aux personnages aussi marquants que torturés, et aux décors dépaysants sans pour autant être exotiques.
Julien Henry s'en joue d'ailleurs pour des plans inventifs. D'une part, en prenant de la distance vis-à-vis de l'action pour installer la tension, à l'image de cette scène de nuit parfaitement tournée digne des grands westerns contemporains du cinéma indépendant américain. Et de l'autre, en collant son objectif aux épaules et aux casques de ses acteurs, captant leurs faiblesses comme leurs moments de rage.
Car on sent bien que ce sont les visages, les expressions de ses personnages que le réalisateur souhaite capter en priorité, dans les moments les plus sombres de leur histoire.
Un récit complexe aux enjeux multiples et aux personnages bien campés, brillamment mené dans le laps de temps somme toute assez restreint de l'œuvre. Ceci laisse présager de belles choses à ce cinéaste d'un style assez rare en Belgique francophone, rappelant autant un Drive qu'un D'Ardennen, autre OVNI cinématographique belge cette fois né de l'autre côté de la frontière linguistique.