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Monstre de Delphine Girard

Publié le 14/12/2020 par Kevin Giraud et Fred Arends / Catégorie: Critique

Avant Noël, les cadeaux

Premier court-métrage imposant de la réalisatrice belge Delphine Girard dont le récent Une Soeur a été nominé pour l'Oscar du meilleur court-métrage de fiction en 2020, ce "monstre" révèle un talent et un regard singuliers.

Monstre de Delphine Girard

Une fille d'une dizaine d'années, Adèle, s'accroche encore à l'enfance et à ses jeux enchanteurs et dérisoires dans la boue et dans les rivières. Journal filmé en vidéo de la pré-ado boudeuse et férocement curieuse, ce court-métrage très prenant en prend souvent la forme, images striées d'une vidéo vieillotte - réelles images d'archives ou mises en scène ? On pourrait se croire dans les années 70 ou 80, une sorte de temps révolu que la cinéaste esquisse avec étrangeté, des parents littéralement dans le flou, deux frères éloignés. Ce n'est pas la chronique d'une enfance singulière, mais une prise sur le temps, un vol de la réalité, de la vie qui passe. La Adèle du futur regardera-t-elle ces images ? Qui sera-t-elle ? D'autant qu'il y a un monstre dans le placard. Il surgit comme un fauve sec et impitoyable, lors d'une scène mémorable et d'une grande acuité de regard. Le monstre de la violence : caméra sur le lit, image à distance et en coin, l'irruption du père et de son geste étourdissant. Haneke n'est pas loin. La mise en scène est directement touchante, de par sa frontalité, et sa franchise, ni remords, ni regrets. Quand c'est moche, la beauté on la trouve n'importe où, comme dans ce magnifique et long dernier gros plan, comme un souvenir lumineux d'Adjani.

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