Présenté en avant-première au festival de Sheffield, Mother, le dernier long-métrage de Kristof Bilsen aborde le traitement de la maladie d’Alzheimer dans un petit village en Thaïlande et soulève les questions sur les soins et la famille moderne.
Mother de Kristof Bilsen
Dans le centre Baan Kamlangchay, Pomm s’occupe des Européens atteints de la maladie d’Alzheimer et leur assène des soins personnalisés. Mais ces soins, seuls quelques occidentaux peuvent se les permettre. Pomm poursuit inexorablement une tache qu’elle ne pourra jamais s’offrir, luttant entre ses deux emplois pour subvenir aux besoins de sa famille. Plusieurs séquences immersives au cœur du centre rythment le quotidien des patients et des aide-soignantes et leur offrent une attention particulière et une écoute tendre. En alternance, des séquences montrent des familles qui prennent la décision de placer leur proche dont la maladie les éloigne progressivement. Dans la continuité de ses deux autres documentaires, le réalisateur de Mother met en place une manière de filmer dans la lignée du cinéma direct, en immersion, se confondant avec les protagonistes. De fait, avec cette exploration critique de la prestation de soins touchant les personnes souffrant d’Alzheimer, le réalisateur Kristof Bilsen aborde la maladie sur le plan de l’accès aux soins et sur les disparités économiques et sociales. Il y propose un regard doux et touchant sur des personnages qui luttent au quotidien, tant du côté des soignants que des familles.
Sur le plan esthétique, s’entremêlent des images filmées par Pomm caméra au point, et des plans plus travaillés sur lesquels s’additionnent les voix de Pomm et de la fille d’un pensionnaire. Kristof Bilsen propose une approche fondée sur l’immersion et l’observation qui lui permet de faire ressurgir et d’explorer chaque émotion face à la maladie et de questionner notre rapport à celle-ci. Cette immersion profonde, à saisir jusqu’à un sourire esquissé délicatement par une pensionnaire, offre au regard avec impartialité, les difficiles contradictions entre ceux qui peuvent se soigner et les autres ainsi que notre rapport à la mort et sur le soin donné à des proches.