Podesta Island de Stéphanie Roland
Programmé au Festival International de Cinéma de Marseille 2021, ce court-métrage envoûtant mêle avec beauté et intelligence la fiction, le récit historique et les histoires légendaires. Découverte en 1879 par le capitaine Pinochio du bateau Barone Podestá, l'île de Podesta serait située à environ 1 kilomètre des côtes chiliennes. Après avoir été cartographiée, on ne retrouve cependant plus sa trace malgré de nombreuses expéditions de recherche... À partir de ce mystère toujours présent, la cinéaste bâtit un film poétique et surprenant. Elle établit différents niveaux de narration qu'elle entrelace grâce à un montage captivant. Alors que la voix off d'une historienne pose le récit « documentaire » et géopolitique, trois personnages de fiction, échoués sur cette île fantôme, seront les portes ouvertes à des récits et à des imaginaires plus intimes mais non moins hantés et mystérieux.
Il s'agit aussi d'une tentative d'appréhension d'un territoire devenu mythique, utopie océanique sur laquelle les histoires s'inventent et se créent. La cinématographie, magnifique, dit notamment cela. Ainsi, les images satellites se révèlent minérales, organiques et composent un paysage, un corps géologique poétique et presque surnaturel. Stéphanie Roland interroge non pas la vérité ou la fausseté de cette île mais ses capacités à imaginer. Le plan long et très beau de la photo de l'île, prise dans un flou de gouttelettes, est moins une preuve qu'une ouverture, une incitation à soi-même inventer ses propres îles personnelles. La secousse sidérante du plan final parachève ce court-métrage éblouissant.