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Sur le tournage de la série Le Trou

Publié le 29/07/2021 par David Hainaut / Catégorie: Tournage

Il était une fois... à la RTBF

Avec Le Trou, c'est une série placée sous le signe de l'autodérision qui vient de se tourner dans les locaux de la RTBF. Les neufs épisodes (de dix minutes) mettent en scène les membres d'une salle d'écriture d'un projet d'émission pour la chaîne publique, qui font la mystérieuse découverte d'un ... trou ! 

Figurant parmi les premiers projets de la nouvelle coopérative Big Trouble In Little Belgium, ce projet réunit quelques jeunes comédiens et comédiennes à suivre, en plus d'un visage familier du petit écran, Nicolas Gob. Plusieurs personnalités de la chaîne publique y feront une apparition, comme François de Brigode, pilier du 19h30. 

"C'est un projet très con, qui se veut régressif et débile, mais qui arrive comme un défouloir après toute la période covid. Pour les auteurs que nous sommes, c'est un punching-ball littéral. En espérant ne viser personne !". Passé - comme beaucoup - par la RTBF, notamment comme réalisateur au service des sports, Benjamin Viré avait depuis longtemps en tête l'idée de tourner une fiction autour des coulisses de la chaîne ("Où il y a tellement de choses absurdes que tout le monde était d'accord pour en faire quelque chose"), au sein-même des locaux du Boulevard Reyers. 

Coproductrice et futur diffuseur de ce Trou, la chaîne publique a donc validé ce projet pour le moins atypique. "Et c'est tout à son honneur", souligne Viré. "Par rapport à l'auto-dérision, ça fait plaisir de voir cette évolution dans les mentalités. Accepter cet humour-là lui donne même une image positive. Mais si on se permet tout et qu'on peut aller loin, on tient à garder une bienveillance. Qui aime bien châtie bien!". Un "on" sous-entendant qu'il s'agit là d'une triple-réalisation, impliquant Étienne Bloc et Manon Henry, s'inscrivant dans la démarche «horizontale» prônée par l'une des dernières venues des productions belges, Big Trouble In Little Belgium.

Un trou... en plein cœur de la RTBF !

Aussi réel que symbolique, ce Trou, découvert - dans la fiction - au fond d'une vieille remise à décors au moment du déménagement de la chaîne, s'assimile à une sorte de fracture spatio-temporelle. Très vite, ce lieu va faire office de projection des espoirs et des anxiétés d'auteurs et autrices tantôt narcissiques, tantôt difficiles, mais toujours terriblement fragiles ! Et en attendant de percer les mystères de cette faille qui cache un secret commun, toutes les raisons vont être bonnes pour ne pas travailler.

Sur le tournage Le Trou de Benjamin Viré

Viré complète : "Les personnages sont un peu des paumés. On part en fait de l'histoire d'une humoriste pas drôle qui, comme tous les artistes, a vécu un trauma quand elle était gamine. Sur un malentendu, elle est alors engagée à la RTBF - chez Tipik - pour dénicher de nouveaux concepts de programmes. Et dès son premier jour, elle voit ce trou...." Sans trop en dévoiler, précisons qu'une vaste cavité a été spécialement construite pour l'occasion. "On va quand même jouer avec des trompe-l'oeil et sur de la post-production, car c'est inévitable", ajoute son initiateur. 

Nicolas Gob, entre Paris et Bruxelles 

Si, pour maintenir la structure narrative, cette série à l'esprit foutraque a été écrite avec sérieux "jusqu'à genoux, par terre !", les comédiens et comédiennes, gardant toujours en tête les grandes lignes directrices du scénario, ont eu une occasion pas si commune d'improviser. Y compris notre entrevue, rassemblant trois des personnages principaux. À savoir Laura Fautré, Prix d'interprétation féminine au Festival Le Court en dit long de Paris l'an dernier (pour Qui vive), la toute aussi prometteuse Madeleine Baudot (héroïne de Pile Poil, César du meilleur court-métrage 2020) et Nicolas Gob qui, malgré une carrière fructueuse en France depuis près de vingt ans, aspire à (re)tourner plus souvent dans son pays.

Ce dernier explique : "Ce projet est un tel OVNI que nos personnages sont quasiment indescriptibles. On est dans un lâcher-prise total". Baudot complète : "Dix-huit jours de tournage avec dix ou onze heures en moyenne par jour, c'est une sorte de longue improvisation ! On m'avait prévenu que ça se ferait dans la joie et la bonne humeur et là, ça se vérifie.". Fautré : "C'est du travail costaud mais ce qu'il y a de bien, c'est qu'une fois qu'on entend le mot action, on peut ajouter des choses en se laissant aller." Des imprévus dans ce cas utiles pour tout le monde, malgré les dix-sept (!) minutes «utilisables» en moyenne, chaque jour. Ce que confirme Bloc : "Il y a des choses qu'on n'aurait jamais imaginé écrire ! Mais on reste à trois sur le plateau pour veiller au bon fonctionnement de l'ensemble.". 

La comédie, ce genre délicat 

Le prolixe Gob, rôdé à des plateaux en général bien cadrés, ajoute encore : "La comédie, ça reste un truc qu'il faut doser. On peut s'amuser entre nous pendant le tournage et rire comme des baleines, mais tout le reste nous échappe. On a le réflexe de se demander si ce sera drôle au final. Mais ici, je pense que ça va l'être. Alors peut-être qu'il y a un côté fabriqué-maison avec beaucoup de jeunes dans l'équipe, mais c'est aussi ça qui donne de l'inventivité et un désir d'aller vite sans que ça n'évince la qualité. Chaque fois que je vais voir sur le combo ce qui a été filmé, je me dis qu'il y a un vrai truc, une vraie idée et une vraie image. Il y a une juxtaposition de burlesque et de folie qui donne une gueule particulière." Héros de la série L'art du Crime vue par plus de quatre millions de personnes sur France 2, ce natif d'Ixelles nous a confirmé la suite du long-métrage comique remarqué en 2019, Les Crevettes Pailletées, où ce sportif invétéré incarne le rôle principal d'un coach de water-polo gay. 

Sur le tournage Le Trou de Benjamin Viré avec Nicolas Gob

Une large palette de personnages 

Les principaux comédiens étant tous présents sur le plateau le jour de notre visite, nous avons croisé Bwanga Pilipili (Burkland, Unité 42...), qui campe Salomé, la responsable de la salle d'écriture. "C'est une colonie d'adultes, donc on s'amuse beaucoup tout en bossant beaucoup. Mon personnage, qui a la particularité d'être distraite, doit garder l'église au milieu du village, en essayant de coordonner l'équipe". Repérée par Viré sur un précédent projet commun, cette actrice active surtout sur les planches (re)jouera bientôt dans sa création Simon, Garfunkel, My Sister and Me, avant d'apparaître dans une série plus grand format (Fils de), à nouveau sur la RTBF.

Enfin, il y avait l'humoriste Baba Nezar, dont c'est la première participation à une fiction professionnelle. "Je joue Baba, mon propre personnage (sourire). C'est un peu le stagiaire collant et lourd, assigné au café et aux tâches ingrates. Un gars sincère et parfois niais, mais attachant". Avant même d'imaginer qu'il serait choisi pour ce rôle, ce Montois avait été intégré à la (vraie !) équipe d'auteurs, afin d'un peu pimenter les dialogues. 

Big Trouble in Little Belgium: un nom à retenir 

Avec un titre faisant écho au classique de Jacques Becker voire au récent film en 3D de Joe Dante, Le Trou est co-réalisé mais aussi produit par Benjamin Viré, celui-ci étant l'un des fondateurs de Big Trouble in Little Belgium. "Le but de notre coopérative, c'est aussi de permettre à des gens de se rencontrer, en créant des connexions entre plusieurs projets, dans tous les genres. On a donc de la suite dans les idées. On le sait, les caméras légères et les moyens actuels - comme bêtement un téléphone - offrent de nouvelles possibilités uniques à des gens de se faire remarquer. Voire donner des perspectives à des gens comme moi, ayant vécu quelques rejets douloureux et répétés de la commission (sourire). On a peut-être dix ans de retard sur la Flandre, mais ce n'est pas grave : les instances sont en train de doucement s'ouvrir et les séries ont aussi ouvert une brèche vis-à-vis du public", conclut ce frais quadragénaire, qui a récemment réalisé un documentaire sur la rumba congolaise diffusé par la RTBF (Bakolo Music International) et qui a notamment un projet de thriller psychologique, pour un long-métrage qu'il tournerait à nouveau avec Nicolas Gob, ami de longue date. 

Avec aussi Kody, François de Brigode et Bla-Bla 

Tournées surtout dans les locaux du Boulevard Reyers, mais aussi à Watermael-Boitsfort et à Ixelles (sur le site de See U) entre ce 12 juillet et ce 1er août, les nonante minutes de ce Trou devraient être montrées sur la RTBF d'ici la fin de cette année. Parmi les comédiens, on pointera Mathieu Debatty (Euh...) et Karim Barras (La Trêve). Quant aux personnalités de la chaîne s'étant amicalement laissés convaincre par le projet, on épinglera entre autres François de Brigode, Benjamin Deceuninck, Bénédicte Deprez, Adrien Devyver, Elodie de Sélys, Cathy Immelen, Kody, Malou, Sélim et même de la fameuse marionnette-maison, Bla-Bla.

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