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The Sound of Belgium – un film du Mois du Doc’

Publié le 18/11/2020 par Kevin Giraud / Catégorie: Critique

Oreilles en sang, tympans défoncés, mais avec une furieuse envie de revivre cette transe de 80 minutes dès les dernières notes du film. Voilà l’une des manières dont pourrait être décrite l’extravagante expérience qu’est la découverte du documentaire The Sound of Belgium.

Signé par Jozef Devillé il y a déjà presque 10 ans, l’oeuvre avait déjà fait grand bruit à sa sortie. Traversant la Belgique du nord au sud, faisant les couvertures et les unes des magazines culturels, le projet a bénéficié de nombreux soutiens ainsi que d’un crowdfunding impressionnant à l’heure où la pratique n’était pas aussi reconnue qu’aujourd'hui. Un cheminement chaotique, une sortie bousculée par des questions de droits d’auteur, mais néanmoins un aboutissement et une consécration en 2012 pour cette équipe de passionnés.

 

The Sound of Belgium

Depuis, le film a dépassé son propre cadre, pour essaimer des événements aux quatre coins de la Belgique ou faire ressurgir de l’oubli des titres phares de l’histoire musicale belge. C’est avec plaisir que nous le redécouvrons encore aujourd’hui dans le cadre du Mois du doc’, et que nous vous invitons à cette plongée mirobolante dans le passé révolu d’une Belgique qui fut, pendant un temps, top of ze pops.La création de cette mythologie, de cette unicité musicale belge démarre dès le début du vingtième siècle avec les orgues mécaniques, et les premiers gourous de la fête que furent les « cartons jockey ». L’occasion de découvrir, brièvement certes, ce passé peu connu de l’histoire Belge, de sa musique et de ses musiciens, mais également d’annoncer ce que sera le film : une galerie de personnages qui ne cessera de s’étoffer, accompagnée par une série de saynètes qui feront découvrir au spectateur le plus avide de pépites une kyrielle de titres et d’artistes méconnus.

Le spectateur le plus réticent ne se laissera peut-être pas convaincre par le ton résolument admiratif du film, qui ne cache aucunement sa fascination pour son propos et pour ses intervenants. À gros coups de montage d’archives dénichées avec talent, d’images recontextualisées, et d’une voix off anglophone digne des meilleurs films américains, The Sound of Belgium ressemble presque à un documentaire Netflix avant l’heure. Mais pour le spectateur un tantinet curieux, qu’importe, tant l’énergie qui déborde du film est communicative.

Parcourant près de cent ans d’histoire de la fête en Belgique en passant par l’arrivée de la soul, du disco, de la New Beat et jusqu’à l’électro et la techno des années 2000, on ne peut qu’être happé par le tourbillon de sons et lumière que déchaîne le film. Ça swingue, ça saute, ça dépote, ça éclate les oreilles, et ça fait un bien fou en cette triste époque de confinement national et de couvre-feu nocturne. Des noms, des mythes aujourd’hui disparus résonnent qui en feront verser une larme à plus d’un. À l’image du Popcorn, qui donnera son nom à une frange entière de la musique pop belge dans les années 70. À l’image du Boccacio, temple de la New Beat dans les années 80. Ou encore à l’image de l’émission Liaisons dangereuses qui fit exploser le paysage radiophonique musical belge dès 1985, au départ d’Anvers.

 

The Sound of Belgium

Au-delà de ces lieux, c’est à travers ses intervenants que Jozef Devillé nous présente ce qu’était vraiment The Sound of BelgiumAlignant un carnet d’adresse impressionnant dans le monde de la musique belge et internationale, le réalisateur et son équipe dénichent une palette farfelue et grandiloquente de bonhommes et de bonnes femmes aussi passionnés qu’eux. Des disquaires se précipitant dans les containers de vinyles dès leur arrivée au port d’Anvers aux producteurs qui accueillaient les futurs prodiges de la techno dans leur salon, tous nous entraînent à 180 beats par minute dans leur souvenirs et dans leur passion, la musique. Et qu’importe les années, qu’importe les fermetures, tous croient toujours en cette divinité unique, la musique, celle qui rayonne, qui rassemble, qui forme sa propre culture. 

Un son « à la belge » qui fit danser le pays tout entier, avant de faire danser l’Europe et le monde. Plus qu’un documentaire, The Sound of Belgium est un patchwork d’images et de beats autant que la Belgique fut et est encore un patchwork de cultures et de peuples. Un patchwork, un cocktail, bref un « melting pot » musical bariolé et explosif qu’on prend en pleine face, avant d’en redemander. 


Dans le cadre du Mois du Doc’, organisé par la Fédération Wallonie-Bruxelles, The Sound of Belgium est disponible en vidéo à la demande durant tout le mois de novembre sur Sooner.be Toute l’année sur www.tsob.be

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