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61ème festival de Cannes : le compte-rendu

Publié le 01/06/2008 par Katia Bayer / Catégorie: Événement

Chaque année, c’est la même chose. Ceux qui n’y sont pas allés envient ceux qui y ont été (« alors, tu as vu des stars ? »). Et ceux qui y sont allés envient ceux qui n’y ont pas été parce qu’ils n’accusent pas de cernes et de décalage avec la réalité. Le point, les points sur Cannes.

L’arrivée
En débarquant à Cannes avec une valise dont le poids frôle celui d’un lave-vaisselle (qu’est-ce qu’on met au festival ? Dans le doute, tout), le contact avec la foule est immédiat. Aaaah, ils sont partout : à l’entrée des salles de projection et des soirées, aux terrasses de cafés et de restaurants, dans les rues, aux abords des hôtels, devant les marches et à proximité des caméras. Agoraphobes, s'abstenir.

61ème festival de cannes: le compte-renduL’accréditation
Le premier réflexe du nouvel arrivant est de devenir un vrai festivalier. Dans cette optique, il reçoit de la documentation, un sac (surtout chic après le 25 mai : « Ah, tu étais à Cannes ? ») et une accréditation à accrocher autour du cou lui permettant d’accéder plus ou moins aisément (selon la catégorie et la couleur du badge) aux projections et au marché. Constatation : l’accréditation, espiègle et légère, ne tient pas en place et se retourne souvent, compliquant les tentatives d’identification de son voisin.

Le marathon
Chaque personne est là pour une raison particulière : le divertissement, la présentation d’un film sélectionné, la recherche de coproducteurs, la vente ou l’achat de films, la couverture et/ou le suivi du festival, la prise de rendez-vous, la représentation d’une institution, d’une cinématographie nationale, la gestion d’un stand au marché, … Dès l’arrivée, le marathon commence : les journées se révèlent trop courtes. Chacun concocte son planning en fonction de ses priorités, disponibilités et envies (les films, les contacts professionnels, les soirées, les marches, …). Mais les cases ne cessent de bouger en fonction des imprévus : fatigue, invitations inopinées, recalage aux séances, choix à faire entre deux films, rendez-vous impromptus, … Heureusement, pour ceux qui se concentrent sur les images, la Compétition officielle, Un Certain Regard, les films hors compétition, la Quinzaine des Réalisateurs et la Semaine Internationale de la Critique n’envisagent pas le concept de la séance unique. Pour les festivaliers, l’information est plutôt utile au moment de la mise à jour quotidienne de leurs programmes. L’angoisse, par exemple, de rater, à cause de la foule, le dernier Woody Allen (Vicky Cristina Barcelona) est atténuée. Plusieurs séances sont prévues, il faut juste prévoir du temps (au moins une heure) pour patienter avant de découvrir la troisième collaboration du réalisateur avec sa muse des années 2000, Scarlett Johansson.

Les films belges
Cette année, en matière de longs métrages, les différentes programmations du festival comptaient une ou plusieurs cases belges : les frères Dardenne présentaient Le silence de Lorna en compétition officielle (récompensé du Prix du Scénario), la Quinzaine des réalisateurs avait sélectionné Eldorado, le road-movie drôle et wallon de Bouli Lanners (Prix Europa Cinémas, Prix Regards Jeunes et Prix Fipresci de la Fédération internationale de la critique) et Elève Libre de Joachim Lafosse. Enfin, la Semaine Internationale de la Critique s’était intéressée à Moscow, Belgium de Christophe Van Rompaey, à Rumba de Dominique Abel, Fiona Gordon et Bruno Romy (en séance spéciale) et à Home d’Ursula Meier. Sur place, ces films, très différents les uns des autres, provoquèrent la curiosité des cinéphiles, d’importantes files d’attentes et des applaudissements nourris, une fois projetés.Des exemples ? À la Semaine Internationale de la Critique, on parlait de l’explosion actuelle du cinéma flamand (Moscow, Belgium : prix de la SACD, de l’ACID/CCAS et Grand rail d’or) et du plaisir procuré par les cinéastes se réappropriant les formes nouvelles de cinéma (Abel, Gordon et Romy pour Rumba). Lors de la projection du premier, les spectateurs se sont pris d’intérêt pour Matty (Barbara Sarafian) et Johnny (Jurgen Delnaet) et leur histoire d’amour difficile en plein cœur de Gand. Le lendemain, Rumba se faisait également fort remarquer pour ses chorégraphies, ses personnages hauts en couleur, son intérêt pour les œufs et les chiens, mais surtout pour ses numéros burlesques dans la douce lignée de L’Iceberg. Succès : le film aura suscité des applaudissements avant, après mais surtout pendant le film !

61ème festival de cannes: le compte-rendu

Le temps
Habituellement, le beau temps atteint la Côte. Cette année, la pluie avait envie, elle aussi, de connaître le festival. Pendant plusieurs jours, les crèmes solaires durent ranger leur indice et les lunettes noires gardèrent les branches croisées : les doigts leur préféraient les manches des parapluies.

Le sommeil
Catastrophique, irrégulier, inexistant. En général, la fin du festival coïncide avec le retour des nuits complètes prestées à des heures décentes. Mais la fatigue et l’aspect vaseux demeurent, un peu comme après un premier janvier. Certains prennent des vacances pour récupérer, les autres se disent qu’ils ont un an pour stocker des marchands de sable dans leur intérieur.

Les stars
Certains n’ont pas besoin de badge à Cannes : ce sont les stars. Elles sont partout : sur les marches, à la télévision, dans les journaux, sur les panneaux des futures productions, sur les façades des hôtels (Indiana Jones fait sa promotion au Carlton), … . Mais les stars peuvent aussi être réelles : Jackie Chan fait un sprint pour échapper à ses fans, Tim Robbins fait de grandes enjambées sur la Croisette, Julianne Moore, présente au festival pour le soporifique Blindness, signe des autographes et du haut de son balcon, Jean-Claude Van Damme, présentant ses initiales à Cannes (JCVD), jette, son t-shirt à la foule l’acclamant, … En général, ces apparitions sont fugaces. Les stars sont partout et nulle part, prévisibles comme inattendues.

Aux abords des hôtels
Pour influencer quelque peu le destin, certains stationnent pendant plusieurs heures d’affilées devant les hôtels, derrière les barrières installées pour l’occasion, dans l’espoir d’apercevoir des visages très connus. Tout en scrutant le moindre mouvement du côté des portes, ils échangent des informations (« Il vient, Johnny, cette année ? ». « Mais non, voyons, il ne vient pas. Il est occupé. ») et des commentaires (« Elle a bien rajeuni, Michèle Torr »). Par moments, l’attente est infructueuse. Un jour de festival, une dame lance à un vigile : « Il y a qui, cette année, au Martinez ? ». Il lui répond, amusé : « Ben, moi ! ». Les rangs rigolent mais le scoop est maigre. L’attente reprend.

Les marches
Si Cannes devait se résumer à un symbole, ce serait celui des fameuses marches. Quand on a la chance de les monter, on a rarement le temps de les compter : ça ne fait pas sérieux et puis, les autres suivent. En guise de souvenir, il y a toujours le carton d’invitation (balcon ou parterre) et la photo mal cadrée prise dans l’urgence et l’effervescence attestant la couleur bien rouge du tapis…

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