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Ateliers Urbains, #1 Flagey et #2 Le Grand Nord

Publié le 15/04/2012 par Sylvain Gressier / Catégorie: Critique

Un atelier, c'est un endroit où on bricole

Métro, boulot, dodo, Delhaize et bar du coin.

Le quartier où l'on aime se balader, les rues qu'on évite à compter d'une certaine heure, notre vie de citadin est toute entière conditionnée par cette entité complexe qu'est la ville. Mais quelle emprise avons-nous sur elle ?

Ateliers Urbains, #1 Flagey et #2 Le Grand Nord

Projet organisé par le Centre Vidéo de Bruxelles (CVB) et Plus Tôt Te Laat (PTTL), dans la continuité des activités audiovisuelles menées depuis 2005, l'Atelier Urbain a pour vocation de proposer un regard citoyen sur la ville en donnant la parole aux habitants eux-mêmes qui, armés d'envies, micros et caméras racontent leurs quartiers. Bruxelles, ville segmentée, carrefour géographique, capitale européenne, fluctuante au gré des mouvements de populations, des aspirations économiques. Le livret DVD présente les deux premières réalisations des Ateliers Urbains, #1 Flagey et #2 Nord. Il est accompagné d'images, de textes et de cartes mentales, dessins personnels de la ville qui sont les éléments de départ du projet, et qui visent, selon une technique créée par l'urbaniste américain Kevin Lynch, à révéler par le biais du dessin à main levée les habitudes de déplacement et de fréquentation des protagonistes dans la ville. L'ensemble est plutôt joli.

Le but affiché par l'atelier est de questionner le spectateur quant aux enjeux urbains contemporains, de décloisonner ces espaces de vie en offrant aux habitants un médium d'expression propre, la réappropriation d'un espace permettant l'épanouissement. Le film est porteur d'un ressenti populaire relayant les inquiétudes et les réactions des habitants quant aux questions qui les touchent directement telles que la dualité entre les populations prolétaires et bourgeoises dans le quartier Flagey ou le cloisonnement des rues résidentielles du quartier Nord, bordés par les tours de verre de la bureaucratie.


Principale ossature des documentaires, les interviews sont diverses et représentatives de l'état d'esprit qui anime le groupe. Les rencontres sont locales, principalement des inconnus, passants, commerçants ou résidents des quartiers. Ce n'est pas un travail d'investigation qui est présenté ici, mais celui d'habitants allant à la rencontre de leur voisinage.

Il y a de l'humour et de la légèreté dans le recul que prend l'atelier dans la réalisation de ses films, l'équipe parfois se met en scène, faisant de son manque de maîtrise technique, un atout apportant la sympathie du spectateur. En effet, cadres douteux, caméra tremblotante, points flous, les défauts sont légions, à tel point que l'on pourrait se demander parfois s'il n'y a pas une certaine complaisance dans le bancal. Le bricolage est omniprésent, plus ou moins heureux, les partis pris de l'image et du montage révèlent cependant une réelle réflexion cinématographique. On sent la présence de différentes sensibilités à la réalisation, ce qui donne un ensemble disparate mais riche de potentiels. Vastes aspirations donc pour des équipes essentiellement composées d'amateurs, mais si le résultat souffre forcément d'écueils techniques et narratifs, on ne peut qu'apprécier la démarche qui a abouti à la pose de ces premières pierres, et qui permit de proposer aux profanes un outil d'expression, propice à la rencontre et à l'enrichissement humain. Si le projet questionne à de nombreux niveaux, il ne propose aucune réponse arrêtée, se posant simplement en observateur, partisan, certes, mais sans être une force de proposition. Une conviction affichée cependant : la ville est un espace de vie qu'il faut continuer à défendre. 

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