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Ateliers Urbains : Stalingrad, avec ou sans nous ? Au Cinemamed ce vendredi 10/12 à 19h

Publié le 08/12/2021 par Bertrand Gevart / Catégorie: Critique

Depuis une dizaine d’années, le CVB met en œuvre des ateliers urbains explorant, par le cinéma, des dynamiques sociales et des rapports entre la ville et les personnes qui y vivent. Le dernier en date s’appelle Stalingrad, avec ou sans nous ? et s’attèle à donner la parole aux habitantes et habitants de ce quartier populaire menacé par une future gentrification visant à démanteler la dynamique actuelle pour la remplacer par des commerces plus attractifs et moins communautaires. 

Ateliers Urbains : Stalingrad, avec ou sans nous ? Au Cinemamed ce vendredi 10/12 à 19h

Comme la destruction de Paris racontée par Benjamin et avec elle, la disparition de la figure du chiffonnier, tout semble commencer par une balade. Le film prend sa source à travers une balade urbaine durant laquelle deux personnes discutent de leur attachement au quartier. Elle se prolonge à Stalingrad en plein chantier, et fait émerger immédiatement des questions critiques et politiques ; de tels travaux auraient-ils pu voir le jour dans des quartiers plus chics de la ville ? Pourquoi sacrifie-t-on toujours les quartiers populaires ? La future station Toots Thielemans a-t-elle, in fine, l’objectif de déloger de force ou de gré les commerces issus de l’immigration actuellement majoritaires dans la rue, à deux pas du centre touristique de la ville ?

Ces quelques questions, dont certaines sont directement posées par le collectif, insufflent des réflexions sur la place et l’impact de l’idéologie du progrès sur la ville et la cohésion sociale. Micro et caméra embarqués, le collectif dresse un portrait poétique et politique du quartier à travers le regard de celles et ceux qui y vivent parfois depuis deux ou trois générations. Ils entreprennent une traversée immersive dans le quartier pour faire exister la parole des personnes qui y habitent, dommages collatéraux des fantasmagories du capital. Tour à tour, elles évoquent leurs problèmes financiers, les nuisances sonores, leur exclusion du projet au profit d’une gentrification à venir, paroles confrontées à celles des politiques locales déconnectées de la réalité.

Le montage alternant la parole des gens à celle des politiques, entrecoupées par les archives télévisées et les plans des travaux en cours assurent un équilibre puissant entre éthique, politique et esthétique brute. Bien que le film n’a pas vocation à faire changer d’avis la politique de grandes infrastructures liées à la bruxellisation, il n’en demeure pas moins qu’il parvient à lancer l’alerte pour d’autres quartiers qui figurent sans doute déjà sur des listes ou dans le viseur de promoteurs. Car ce qui fait sans doute la réussite du film, c’est le collectif lui-même, qui porte les images dans leur dimension critique, utilisant l’image en mouvement et la voix comme amplificateur de résistance face à la domination d’un système qui tend à les marginaliser.

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