L'écriture est une passion qu'elle vit sans l'angoisse de la page blanche. Mieux, elle nous avoue déprimer si elle n'écrit pas pendant plus d'un mois. L'écriture c'est le chaudron magique dans lequel elle est tombé et qui lui a permis de multiplier les expériences tant en journalisme qu'en scénario de bédé ou de film. Portrait.
Entrevue avec Gabrielle Borile, scénariste
Son premier souvenir de cinéma, elle l'a vécu avec son père en voyant Joselito un mélo espagnol. Mais les films qui l'ont le plus touchée sont ceux réalisés par Alfred Hitchcock Une époque où elle passait ses soirées au Musée du cinéma. Comme in n'existait pas de magnéto de poche, « je rentrais très vite chez moi pour noter comment les films étaient faits. Je les mémorisais, et me les repassais dans la tête. L'écriture d'un scénario c'est de l'algèbre et de l'inconscient. Il y a les deux. Et cela me convient parfaitement. Quand j'écris des dialogues par exemple je passe un mois d'une grande intensité, je ne vois plus rien, j'ai des horaires mais je vis cela de façon très forte. Les cadeaux que je reçois sont les fruits de l'inconscient, mais donnent aussi la possibilité de revenir à la raison, de pouvoir être maîtrisés. Et c'est nécessaire, si l'on compare l'élaboration d'un scénario à la littérature qui, pour moi, est moins structurée, moins rationnelle et où domine le plaisir des mots. J'ai commencé à écrire pour la bande dessinée. J'avais 20 ans, j'ai rencontré François Rivière. »
Elle le voyait écrire avec une telle aisance que de fil en aiguille elle est entrée dans ce monde, où il lui fait rencontrer Goffin, Berthet qui étaient encore étudiants.
« À cette époque j'étais journaliste, j'écrivais des chroniques bédé pour Le Vif/l'Express (1981). Un copain m'a proposé de d'écrire le scénario d'une bédé et il m'a présentée à Francis Carin qui dessinait des couvertures pour Pourquoi pas et une bande dessinée sur la Guerre 14-18. J'ai proposé à François de s'associer à moi pour l'écriture et nous sommes partis sur une série qui s'appelle Victor Sackville espion de George V, une série d'espionnage qui est publiée par les Editions du Lombard depuis 1983. Et depuis lors cela continue. Chaque année un album paraît. Actuellement je continue en alternance avec François Rivière ». Rencontrant Luc Delisse, celui-ci lui apprend que la télé organisait un séminaire d'écriture. Il fallait remettre un projet de série et pour corser le délai, celui-ci était de deux jours. Elle sort un vieux projet bédé et le présente et est acceptée. « Nous étions une douzaine. C'était le fameux séminaire Lavandier. Cela a été pour moi une révélation, il y avais une demi-heure de théorie ensuite on devait écrire une scène pour le lendemain. Dans un tel état d'urgence, il n'y avait plus de place pour le doute et comme je suis quelqu'un qui doute ... Je me souviens que le lendemain c'était un plaisir fou de lire la scène devant tout le monde ».
Puis Benoît Lamy fait appel à elle. Au départ, elle croit à une blague. Pas du tout. « Il avait un projet d'adaptation qu'il avait du mal à imposer à la Commission de Sélection du film ». Elle rédige donc une note d'intention sur l'adaptation et Combat de fauves reçoit très vite une aide à l'écriture. « C'étais une gageure, moi qui n'avait jamais écrit de long métrage mais je travaillais avec Benoît. C'était merveilleux. A l'époque j'étais très structurante et pour ce huis-clos il fallait une écriture tenue, il fallait que chaque scène apporte quelque chose de nouveau. C'était un exercice très périlleux. J'ai beaucoup aimé travailler avec Benoît, il était très généreux. Diana Elbaum, lui commande une adaptation de « La plage D'Ostende » de J. Harpman. pour un téléfilm. « Mais Diana ayant des problèmes de santé, le projet ne s'est pas concrétisé, malheureusement parce que j'avais beaucoup travaillé les séquences du film et en plus elle commençait à envisager que ce devait être un film prestigieux, avec un auteur belge.
« Mon travail pour France 2 a démarré avec Les enfants du jour, un film que Rosanne Van Haesebrouck de To do Today Productions à co-produit avec France 2 et qu'Harry Cleven a réalisé. On a cartonné avec plus de 33% d'audience ». Cela lui ouvre ouvre des portes. Tous les projets qu'elle propose sont pris par France 2. Mais il y a deux ans elle décide de replonger dans le cinéma même si elle sait devoir être moins bien rémunérée. « Mais bon après avoir fait six téléfilms c'est plus confortable pour moi. Cela m'a permis de rencontrer Miel Van Hogebempt qui préparait un documentaire sur l'univers des Miss. je lui ai dit que ce serait un bon sujet de film de fiction Cela se passait il y a deux ans et maintenant c'est en pré-production. Et cela s'appellera Miss Montigny et cela m'a permis de mettre un peu de moi-même dans le scénario parce que j'y suis née, à Montigny. Il y a quelque mois, elle fait la connaissance de Geneviève Mersch. Elles ont un projet commun. « Il y a un moment que je me dis qu'il faut écrire avec le réalisateur, plutôt que d'écrire uniquement le scénario. Mais en même temps j'aime bien écrire toute seule, je me lance et je prends mon pieds. Donc là en l'occurrence je me dis je vais écrire le plus possible et après je fais intervenir le réalisateur. Un des thèmes qui me travaille c'est le rapport mère/fille. Il se trouve dans tout ce que j'ai écris, parfois la fille devient un fils mais le sujet reste récurrent. J'ai perdu ma mère à 16 ans. Cela explique peut-être cela.
Je ne crois pas qu'un scénariste ne soit qu'un artisan qui met en forme les désirs et souhaits d'un réalisateur. Il n'est pas que ça. Et en même temps nous ne sommes pas que des techniciens de la narration. Il a aussi un univers à donner. Et je voudrais que les jeunes réalisateurs qui éventuellement n'ont pas encore assez d'expérience de vie puissent aussi profiter de notre expérience, que cela soit un rapport d`échanges fructueux. Une idée de scénario ne fait pas un film, c'est l'approfondissement des personnages, c'est les instants de vie que l'on y met parce que le scénariste y met aussi des choses personnelles. C'est pourquoi je souhaiterais que le jeune réalisateur avec qui je voudrais travailler ait pu faire ses preuves pour qu'il n'éprouve pas le besoin de cannibaliser l'autre. Que cela soit un véritable échange. »