Après Forêt noire (2014) et Les amoureuses (2015), Catherine Cosme signe Famille (2018), un court-métrage qui aborde l’immigration en Belgique, une thématique bien ancrée dans notre actualité. Depuis sa sortie, Famille a été sélectionné dans plusieurs festivals en Belgique et à l’étranger.
Diplômée en scénographie, Catherine Cosme occupe majoritairement le poste de scénographe au théâtre et chef décoratrice au cinéma. Son désir de se lancer dans l’écriture et la réalisation de films est né de son étroite collaboration avec divers metteurs en scène et réalisateurs dont elle n’a cessé d’observer scrupuleusement le travail depuis le début de sa carrière.
Famille de Catherine Cosme
Au volant de sa voiture, Lisa croise la route d’une famille somalienne, un couple et leur fille, en situation précaire et décide de l’héberger temporairement dans son appartement. Dès leur arrivée, Lisa les écoute parler devant elle, mais le sens de tout ce qui se raconte lui échappe. Les seules informations qu’elle parvient à obtenir d’eux se résument à leur identité. Houria et Youssif viennent d’arriver en Belgique avec leur fille Nour et attendent impatiemment un rendez-vous au Service des étrangers. Bien qu’elle insiste pour qu’ils se sentent chez eux, la pudeur les pousse à rester discrets et confinés. Les silences sont parties prenantes de l’histoire, ils s’installent dès le début et invitent à une profonde introspection. En effet, la réalisatrice nous place dans la même position que Lisa. Nous sommes confrontés à toutes sortes de questions que nous essayons d’élucider. Avides d’informations, nous sommes traversés par des sentiments contradictoires qui ne nous quittent jamais. Pour renforcer cette intention, Catherine Cosme fait en sorte que la spatialité entre en résonance avec la narration. Nourrie par sa position de directrice artistique, la question du décor est toujours inhérente à celle de la mise en scène.
Dans Famille, chaque pièce, ses couleurs et ses objets, racontent quelque chose. Les plans fixes et frontaux nous donnent la possibilité de prendre le temps de vivre ce qui se passe, de la même façon que le permettent les silences.
Enfin, l’absence de lumière à l’intérieur de l’appartement pendant la nuit, répond à une envie de renforcer l’intimité que la famille somalienne tente de maintenir. Ces choix esthétiques participent intégralement au questionnement qui entoure l’histoire car, presque jusqu’à la dernière seconde, nous ne savons pas quelle en sera l’issue.
Le film est une rencontre entre deux familles qui tentent de se comprendre malgré la barrière linguistique. Il parle également du regard de l’autre, de la recherche d’identité et du sentiment d’abandon que ces familles déracinées peuvent ressentir lorsqu’elles arrivent dans un pays dont elles ignorent tout.
Ce projet fait référence à une expérience similaire que Catherine Cosme a vécue durant l’hiver 2015. Soucieuse des conditions de subsistance des réfugiés arrivés massivement en Belgique durant cette période, elle décide de se rendre impulsivement à la Croix Rouge de Bruxelles et de proposer d’accueillir chez elle des familles fragilisées. Les questions qui l’ont habitée à cette époque et le regard à la fois admiratif et réticent de ses proches lui ont véritablement donné l’impulsion de partager avec nous, cette expérience particulière et humaine.