Où va la nuit de Martin Provost
Il y a un côté Simenon dans Où va la nuit, le dernier film de Martin Provost. On peut aussi y joindre La Cérémonie d'un autre grand adepte de Simenon, Claude Chabrol. Celui-ci, dans ce film avec Isabelle Huppert et Sandrine Bonnaire, nous décrivait le parcours de femmes se libérant d'un ordre social qui les liait à la soumission de leur désir et au mal être d'une peur sans Rose Mayer est à la disposition de l'autre, de son mari qui fait peser sur ses épaules la mort accidentelle d'un de ses enfants. L'enfer, c'est les autres, écrivait le Sartre existentialiste.
Pour Rose, c'est son mari. Après l'avoir éliminé, elle essaie de retrouver le paradis chez son fils à Bruxelles. Passer de la province à la capitale n'est pas aussi simple que ce qu'elle a imaginé, et cela nous vaut de très beaux plans d'un parcours dans la ville de Bruxelles (aussi surprenants que ceux qui sont réalisés par Jerzy Skolimowski dans Le Départ et Alain Resnais dans Je t'aime, je t'aime ou Providence).désir de l'autre.
Yolande Moreau, césarisée pour Séraphine, le précédent film de Martin Provost, illumine l'interprétation de Rose qui essaye de passer de l'obscurité à la lumière. Son fils, empêtré par le poids des relations symboliques parent-enfant la fait trébucher, mais elle ne tombe pas grâce à la logeuse de sa chambre de la capitale de l'Europe. Un personnage de patronne de petit hôtel incarné par une Edith Scob toujours aussi assourdissante (des films de Georges Franju à ceux d’Olivier Assayas). Une sorte de duo féminin opère, se met en scène, et rompt le silence permettant à Rose de s'envoler vers une autre vie. Même si la prison la guette.
Bonus
Le réalisateur nous explique l'adaptation française épurée de Mauvaise pente, le roman de Keith Ridgway (Prix Femina) qui se passe en Irlande et non pas en Belgique. Après l'interprétation de Yolande Moreau dans Séraphine, le personnage de Rose est très vite apparu pour Martin Provost comme devant être incarné par elle. Par rapport au livre, Yolande Moreau explique avoir voulu éviter le personnage type de la victime féminine.
Où va la nuit, Martin Provost, édité par Diaphana/TF1, distribution Twin Pics