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Sur le tournage du film Gio d'Ivan Goldschmidt

Publié le 03/02/2022 par Harald Duplouis et David Hainaut / Catégorie: Tournage

De Los Angeles à Dilbeek

"Vous êtes franchement les bienvenus sur ce tournage, car ce projet est complètement fou !". Malgré la froideur de ce mois de janvier, c'est avec cet enthousiasme que nous a accueilli l'équipe de Gio, titre d'un futur long-métrage qui sera le premier d'Ivan Goldschmidt. Un réalisateur belge qui a marqué les esprits en 2011, en étant nommé aux Oscars avec son court-métrage Na Wewe.

Onze ans plus tard, ce Bruxellois franchit un cap avec un road-movie qui mélangera les genres et sera articulé autour d'un quatuor d'acteurs : Virginie Hocq, Olivier Massart, Bérangère McNeese et le débutant David Macaluso. 

Période covidienne oblige, c'est par un désormais traditionnel test nasal qu'a débuté cette visite de tournage. Se déroulant pendant quelques jours au café In de Linde, un endroit bien connu de Dilbeek servant autrefois de halte pour voyageurs (la légende dit que Napoléon y est passé), le plateau réunit une quarantaine de personnes autour d'Ivan Goldschmidt. Réalisateur et même auto-producteur pour l'occasion, il détaille : "En fait, j'ai décidé de faire ce film à ...l'envers: je l'ai produit et financé, j'ai fait les repérages, et là je le tourne en faisant monter des gens dedans au ...coup de cœur !" Ce qui donne une équipe mixant techniciens chevronnés et de frais diplômés d'écoles de cinéma, pour qui il s'agit là d'une sorte de stage en or. "Tout est parti de ma petite boîte (NDLR: Cut!) qui n'avait encore jamais produit de long-métrage, ce qui reste très différent de faire un court-métrage". Rappelons qu'avant son Na Wewe l'ayant amené aux Oscars, Goldschmidt avait co-signé - avec Manu Coeman - un autre court remarqué en 2008, Ketchup.

"Pour mettre en place ce projet-ci, je suis allé dans tous les sens. Pour l'anecdote, je n'étais même pas agrémenté par l'ONSS pour obtenir le fameux Tax shelter ! À deux jours près, je ne l'aurais d'ailleurs pas eu. Puis, une chaîne de télévision (Be TV) est entrée avec autant d'engouement que nous dans le projet. Avant que d'autres personnes, parfois issues d'autres structures, ne se penchent dessus, ce qui m'a été très précieux. Et là, on a de bons rushes qui, j'espère, donneront encore l'envie à d'autres d'investir..."

Virginie Hocq de la partie

On l'aura compris, comme on le dit dans le jargon, c'est un film fabriqué à «l'arrache» dont il s'agit ici. Une entreprise d'une vingtaine de jours d'autant plus réalisable qu'il s'agit d'un road-movie, tourné entre Charleroi (Courcelles, Gouy-Lez-Piéton...) et Bruxelles (Hôpital Erasme), en passant par le Brabant wallon (Baulers, Jodoigne, Nivelles). "Un road-movie à la belge !", complète même notre interlocuteur. "Le film se passe entre Thuin et Bruxelles, soit tout juste soixante-sept kilomètres. C'est un petit déplacement qui a la particularité de se faire avec une ambulance. Car c'est l'histoire d'un père qui, à l'occasion d'un transfert pour une transplantation cardiaque, revoit sa fille qu'il n'a plus vu depuis huit ans. Et la question fondamentale du film, c'est «Est-ce que ce voyage va leur permettre de se retrouver ?» En marge de cela, il y a un tas de choses inattendues qui se passent, faisant qu'on va d'un état à l'autre, du rire aux pleurs et inversement. J'appelle ça une dramatique comédie. Il y a quatre personnages principaux: Olivier Massart qui joue le père, Gio, Bérangère McNeese sa fille. Avec les deux ambulanciers, Virginie Hocq et David Macaluso, qu'on n'a encore jamais vu dans un long-métrage".

Entre les gouttes du variant Omicron

Et lorsqu'on lui fait part de commentaires de certains membres de l'équipe, qualifiant ce projet de «fou», le réalisateur rétorque : "C'est vraiment le mot, parce tout s'est mis en place à une vitesse éclair. Malgré l'arrivée de l'épidémie et les lockdown successifs, j'avais très envie de faire un long-métrage. Je suis don allé voir mon copain Olivier Massart qui, en plus d'être comédien, est dramaturge et auteur. Comme je connais son envie de faire du cinéma et qu'il devait à mes yeux interpréter un rôle de «tête», mon idée a été d'écrire ensemble un film – ainsi qu'avec Nicolas Legrain, lui aussi acteur pour l'occasion - et de le tourner dans la foulée. Mais la folie, ça reste surtout le covid: on a déjà eu huit cas positifs sur le plateau, ce qui nous a fait changer sans arrêt le plan de travail. Même des figurants ont été contaminés et dû être remplacés au pied-levé ! On a dû travailler à cheval sur Noël et le Nouvel an. Et on est obligé de tourner dans la lumière du jour, alors que les journées sont hyper courtes. Mais c'est aussi cette somme de difficultés qui motive et soude l'équipe. Disons qu'on arrive à tenir la barre au milieu d'un océan déchaîné ! Et là, le fait d'être toujours vivant en cours de tournage, ça donne encore plus envie de faire le film !" (sourire)

De la place pour l'improvisation

Cinéaste ayant été l'un des premiers coachs de la Ligue d'Improvisation et appréciant laisser à ses acteurs une certaine liberté, Goldschmidt a volontairement pensé son film dans ce sens. "J'aime bien créer des structures précises et donner un espace aux comédiens. Si on choisit des êtres humains, ce n'est pas seulement pour qu'ils deviennent des marionnettes du textes, mais pour qu'il y apportent leur personnalité. Cela amène toujours des surprises qu'on n'aurait jamais eues si on avait tout dialogué au préalable. On a beaucoup de matière et cela prend peut-être plus de temps à monter, mais mon expérience me fait penser que quand on improvise dans le sens du scénario, c'est contrôlable."

Un deuxième long-métrage pour 2022

Quant à savoir pourquoi aura-t-il fallu plus d'une décennie avant de le voir franchir le cap du long-métrage, Goldschmidt répond : "C'est vrai que j'ai beaucoup attendu mais maintenant, je le fais ! Vous savez, quand je me suis retrouvé à Los Angeles, il y a un gros producteur américain avec un gros cigare qui m'a fait venir tout de suite et qui m'a demandé ce que j'avais à écrire. Mais je n'avais pas de scénario, encore moins en anglais ! J'ai quand même beaucoup écrit depuis, car j'ai quatre long-métrages prêts et qui sont là, clé sur porte ! Dont Chaleur sans frontière, qui est un tournage plus lourd à financer et qui se fera avec la société Stenola" (Les Intranquilles, La Dernière Tentation des Belges ...). Cet autre film évoquera l'histoire d'une ONG belge implantée en Afrique. "On attend encore un peu d'argent international, et on devrait normalement le tourner à l'automne prochain." Diplômé de l'INSAS et ancien prolifique réalisateur de publicités (une centaine dont les fameuses pub Kriek Bellevue, c'était lui), peintre et sculpteur, ce touche-à-tout a aussi enseigné la direction d'acteurs au Conservatoire de Mons.

En attendant la fin du montage cet été, Goldschmidt table sur une distribution en salles. "J'invite d'ailleurs tous les distributeurs à s'intéresser à Gio", dit-il. En plus des comédiens cités, le film verra défiler une dizaine de comédiens du cru, dont – entre autres - Alain Bellot (Baraki), Toni d'Antonio (Fils de plouc), Thomas Demarez (Chez Nadette) ou Mattéo Salamone (Mon Ket).

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Gio