Dans Avant/après, Manöel Dupont raconte l’histoire de Jérémy et Baptiste, deux nouveaux amis, traversés par un même complexe : leur calvitie. Le premier protagoniste rencontre le second en faisant du stop et nous ne pouvons qu’être touchés par la franchise et la transparence qui caractérisent rapidement leurs échanges.
Avant/après de Manöel Dupont

Ils se mettent à nu, se livrent en dévoilant une sensibilité touchante sans s’empêcher de se contredire toujours avec douceur. Leur lien se renforce grâce à leur voyage à Istanbul où ils décident de se faire opérer pour faire disparaître leur calvitie. Un rapport d’argent quelque peu malsain peut rapidement se déceler entre les deux jeunes hommes : Jérémy offre le voyage et l’opération à son nouvel ami grâce à un héritage laissé par son père.
Le film met d’abord en lumière l’absurdité des dérives du capitalisme en matière de canons de beauté en dépeignant toute la technologie liée à ce type de chirurgie esthétique, reflet de larges profits et d’un grand luxe au sein de ce milieu. Mais la nouvelle assurance qui définit leur rapport à leur corps se consolide d’autant plus grâce à leur support mutuel à travers chaque étape de leur transformation. Les deux amis commencent rapidement à montrer des signes d’affection l’un envers l’autre, des gestes empreints d’une certaine sensualité. Le rapport financier qui les lie et déséquilibre leur relation rend de prime abord ces actes quelque peu étranges, artificiels pour les spectateurices. Toutes ces étreintes, ces baisers, ces échanges doux et brutaux brossent par ailleurs le tableau d’une masculinité peu commune, alternative, élément central du film souligné notamment lors de la projection du film au Pink Screens, festival du cinéma queer bruxellois. En effet, les deux amis n’hésitent pas à se dénuder sans montrer la moindre once de honte ou de retenue. Malgré cet homoérotisme omniprésent entre eux, leur homosexualité n’est toutefois jamais exprimée clairement. Un élément tragique se produit finalement et laisse le spectateurice décider si Baptiste a orchestré dès le départ une mascarade à l’encontre de Jérémy. Bouleversé par le tournant que prend leur relation, ce dernier se liera davantage d’amitié avec un Syrien qui a fui la guerre pour émigrer en Turquie et a fait la connaissance des deux voyageurs belges quelques jours plus tôt. Un même mystère plane sur une possible romance entre Jérémy et l’autre jeune homme. À nouveau le doute et l’ambiguïté sont de mise et la fin ouverte pourrait laisser une sensation d’inachevé, mais aussi de possible renouveau auprès des spectateurices.
Ce film creuse ainsi le sujet peu commun ou mis en évidence des rapports que les hommes entretiennent avec leur corps et ceux de leurs semblables avec une touche d’humour et d’ironie aussi grisante que terrassante. Il nous rappelle aussi que l’amitié et l’amour ne sont souvent que de plates constructions sociales dont les bases sont tout autant fictives que fragiles.









