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Carole Matagne - comédienne et créatrice de la série Une semaine sur Deux

Publié le 21/02/2022 par Harald Duplouis et Kevin Giraud / Catégorie: Entrevue

Un matin à se perdre dans les couloirs de la RTBF, cette fois à la rencontre de Carole Matagne, comédienne, humoriste et créatrice de la série Une semaine sur deux avec son compère Mathieu Debaty. Avec elle, nous découvrons les coulisses de cette série pétillante, à l’écriture cinglante et résolument actuelle. Rencontre.

Cinergie : Pouvez-vous nous parler un peu de votre parcours ?

Carole Matagne : J’ai débuté sur le tard, il y a une dizaine d’années. Le théâtre me tentait, je me suis inscrite dans un atelier et j’y ai petit à petit pris goût. De là, j’ai commencé à faire de l’impro, ce qui m’a amené à jouer dans des pièces, puis à écrire. Avec Mathieu Debaty, j’ai créé un spectacle sur le thème de la belle-mère. S’en est suivie la série, et de fil en aiguille, c’est ainsi qu’est né le projet Une semaine sur deux.

 

C. : Comment a débuté votre collaboration avec Mathieu Debaty ?

C.M. : On s’est rencontrés à travers différentes scènes ouvertes, j’aimais beaucoup son style, son humour. Il faut savoir qu’on vient de la même région. Nous étions à l’école ensemble durant tout notre parcours, sans pourtant s’être jamais côtoyés ! On n'avait jamais créé de lien, cela arrive. C’est donc plus tard que la rencontre a eu lieu, et là, ça a été un vrai match pour l’écriture. Désormais, c’est lui qui me met en scène pour mes spectacles.

 

C. : D’où vous est venue l’idée de travailler ce personnage de belle-mère ?

C.M. : Parce que je l’ai vécu ! J’ai passé plusieurs années avec quelqu’un qui avait un enfant, et j’ai compris la difficulté que cela peut être de vivre avec un petit être qui n’est pas à soi. En tant que belle-mère, on est souvent mal jugée par son entourage, et ce thème des familles recomposées me semblait très actuel. Il y avait quelque chose à creuser dans cette direction. Avec Mathieu, nous avons écrit un spectacle très caustique, très irrévérencieux. Et dès sa mise en scène, j’ai tout de suite eu envie de transformer cela en série. C’est là que nous nous sommes lancés. Bien sûr, il fallait adapter la matière à un public plus familial, mais on a réussi à garder ce ton décalé et cet humour dans la série.

 

C. : Avec un casting déjà en tête ?

C.M. : Pas du tout ! On s’est d’abord concentrés sur le dossier, avant de se lancer dans notre recherche. Nous avons vu beaucoup, beaucoup d’enfants. Max [Maxime Clausse] a été choisi dès le pilote, il est avec nous depuis le début de l’aventure. Pour le personnage d’Alice, nous avions trouvé une jeune fille extraordinaire, mais malheureusement pour elle elle avait trop grandi quand le tournage a eu lieu. La mort dans l’âme, on a dû caster une nouvelle personne pour le rôle, et c’est Léontine Clerbois qui nous a conquis. Pour le clin d'œil, son personnage s’appelle Alice, en hommage à la première fille que nous avions choisie.

 

C. : Comment tourne-t-on une série de ce genre ?

C.M. : Vite, très vite ! Pas le temps de souffler, les prises s’enchaînent. Dès la fin de la première, il faut foncer se changer, à la coiffure, au maquillage. C’est un rythme autrement plus rapide que celui du cinéma. Le rendement est impressionnant. En tant que comédienne, on a pas le temps de se poser des questions, on fait entièrement confiance au réalisateur. Joachim Weissmann a été exceptionnel pour cette saison 2 [Grégory Beghin a réalisé la saison 1 ndlr], nous avons été sa pâte à modeler, ses marionnettes. On a senti toute la préparation et le travail qu’il avait fait en amont, et c’est très important dans ce type de tournage.

 

C. : Un rythme facile à gérer avec des enfants ?

C.M. : Les enfants sont des machines à tourner ! Tous les soirs, nous recevions notre texte pour le lendemain, en fonction des évolutions du tournage, et tous les jours ils connaissaient leurs répliques sans accrocs. Pas besoin de leur demander mille fois de jouer les choses, c’était inné chez eux. À partir du moment où ils maîtrisaient leur texte, ça fusait avec une précision impressionnante. Dès la répétition, ils avaient saisi la mécanique du sketch, et délivraient un jeu extrêmement juste. Je suis très fière d’eux, de leur travail et de leur professionnalisme, après l’aventure superbe qu’on a partagé.

 

C. : Des moments particuliers que vous souhaitez partager ?

C.M. : Un peu de tout ? Nous avons eu la chance d’avoir un tournage très beau, et une équipe de tournage incroyablement soudée, du chef op’ au régisseur. On faisait des pauses musicales, on dansait, c’était une ambiance… Ce sont tous devenus des gens que je porte vraiment dans mon cœur. On oublie parfois toute l’importance de l’équipe derrière la caméra quand on découvre la série, des réalisateurs aux décors aux preneurs de sons en passant par les accessoiristes et tous les autres, mais ils sont partie intégrante de celle-ci. J’ai dit que c’était incroyable ? Parce que c’était vraiment incroyable. Je suis ravie d’avoir rencontré de si belles personnes.

 

C. : Sur le fond, la série redéfinit la parentalité, c’était important pour vous ?

C.M. : Sans être maman, j’ai été dans les chaussures de la belle-mère pendant un temps, et quand je vois les défis auxquels sont confrontés les parents autour de moi vis-à-vis de cette nouvelle génération, tellement différente de la nôtre, c’est très compliqué. Mais en même temps, c’est délicieux de pouvoir écrire là-dessus, en s’en moquant aussi bien sûr. Montrer des parents dépassés par les événements, et qui tentent malgré tout de rester près de leurs enfants, c’est très intéressant. On devient tellement vite has been aujourd’hui, moi-même je ne me considère pas has been, mais en parlant avec mes neveux je me rends parfois compte du décalage qui existe…

 

C. : Et déconstruire les stéréotypes en passant ?

C.M. : Avec Mathieu, on joue bien sûr avec ceux-ci parce qu’ils font toujours rire. Mais en même temps, on essaie d’aller plus loin, d’ajouter une touche en plus. En impro, il y a un exercice qu’on appelle le oui, et…, et c’est cette idée de rajouter de la substance, un décalage. On adore provoquer chez le public ce oh… ils ne vont pas oser… Et quand on en est là, on ose. Pour moi, on peut rire de tout. L’humour a été une arme dans ma jeunesse, qui m’a permis de construire mon identité. Et puis, on s’emmerde quand on ne rit pas non? Le rire, c’est ma plus belle drogue.

 

C. : Quels ont été les retours du public ?

C.M. : J’ai reçu de nombreux messages sur les réseaux, cette série a été une vraie bulle d’oxygène pour certaines personnes. Souvent, on me disait : “Vous dites un peu tout haut ce qu’on pense tout bas”, et c’est merveilleux d’entendre des retours comme ça, cela nous rassure aussi. Bien sûr, il y a toujours des gens qui n’aiment pas. Et tant mieux, si la critique est constructive cela nous permet de nous améliorer. De manière générale, je suis très contente des retours. Si l’on rempile pour une saison deux, c’est que ça s’est bien passé non ?

 

C. : Avec cette saison 2, vous abordez un nouvel axe ?

C.M. : Nous avons décidé avec Mathieu de développer les personnages secondaires, et de faire grandir nos protagonistes. Alice a un petit copain, la famille a déménagé, les parents de Jean-Jacques sont plus présents, ma meilleure amie également. Le tout pour donner plus de profondeur, parce qu’une famille c’est aussi les personnes qui gravitent autour. Une famille qui déménage pour faire table rase du passé, et bien évidemment il va se passer plein de choses, mais cela je vous le laisse découvrir ! Avant, on l’espère beaucoup avec Mathieu, une saison trois. Puis quatre, cinq, six, et dix pourquoi pas ! Emmener la famille en vacances, à la plage, au ski… Je suis plus que partante pour ça.

Une semaine sur deux est à découvrir en intégralité sur Auvio.

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