Ce documentaire tourné durant la période de confinement suite à la pandémie de Covid-19 donne la parole à des jeunes belges francophones comme peu de films l’ont fait. Avec le recul de 2023, leurs discours sur la privation de libertés fondamentales ainsi que l’application des mesures sanitaires par les autorités sont révélateurs de certaines injustices inhérentes à nos sociétés contemporaines. Capturés de manière intimiste, ces échanges interrogent des concepts en lien avec la citoyenneté et la construction du monde de demain.
Entre-temps de Federico D’Ambrosio et Géraldine Brausch
Si parfois un regard en dit plus que des mots, comme le suggèrent les premières images d’Entre-temps, le dialogue s’installe progressivement entre les groupes d’élèves d’âges différents interrogés dans le cadre d’un cours de philosophie et lettres. Les élèves sont issus de plusieurs écoles de Bruxelles, Liège et Verviers.
Alors que l’on pense assister à un énième documentaire sur la frustration et les émotions suscitées par le confinement, les thématiques abordées permettent d’avoir une réflexion intéressante sur nos démocraties et la citoyenneté.
Grande introspection pour l’humanité, cette période de confinement a été révélatrice pour beaucoup de monde. Les récits de vie sélectionnés exposent le manque d’équité dans certaines mesures et leurs applications, notamment selon le statut social ou l’origine ethnique. Peut-on enfreindre une règle si moralement l’infraction relève d’une forme de citoyenneté que l’on trouve plus juste que la règle en elle-même ? Quels sont les modes d’action adaptés afin de manifester son mécontentement face à des mesures arbitraires qui s’imposent à nous ?
Le documentaire Entre-temps met en lumière les récits personnels et les positions des élèves après le premier déconfinement, mais également lors du reconfinement quelques mois plus tard. Alors que les dirigeants du monde entier ont fait le choix de protéger en priorité la santé des personnes âgées par la mise en place de règles unilatérales ne prenant pas en compte la réalité et les besoins d’autres catégories de la population comme les jeunes, certains groupes d’étudiants s’interrogent avec raison sur la légitimité de cette approche conditionnée par des raisons économiques ainsi que la mainmise sur le pouvoir de certaines classes sociales : « De manière générale, si la peine d’une infraction est sanctionnée par une amende, on peut imaginer qu’elle a été pensée pour la classe inférieure », dit avec beaucoup de justesse l’une des protagonistes de ces groupes de discussion.
Federico D’Ambrosio a participé à de nombreux documentaires en tant que chef opérateur, directeur de photographie. Il a également réalisé le documentaire Charbon (2010) ainsi que BXLX24#3 en 2012. Géraldine Brausch enseigne la philosophie à la Haute École Charlemagne depuis près d’une dizaine d’années. Elle est également chercheuse et collaboratrice scientifique à l’Université de Liège depuis une quinzaine d’années.