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Grise Mine de Rémi Vandenitte

Publié le 05/03/2010 par Sarah Pialeprat / Catégorie: Critique

Grise mine, le court métrage de fin d'études de Rémi Vandenitte a marqué les esprits des jurys du Festival Anima. Deux prix ont été décernés à cet étudiant fraîchement sorti de la Cambre, le Grand Prix de la Communauté française du meilleur court métrage et notre Prix Cinergie.

Le travail de la mine a laissé son empreinte. Ses éboulements, sa violence quotidienne et ses coups de grisou résonnent encore dans les mémoires, et si les images semblent appartenir au passé, le souvenir et les traces laissées sont encore vivaces.
Deux courts métrages belges d’animation se sont emparés du sujet. Mémoire fossile d’Anne-Laure Totaro suivait le voyage d’un enfant au cœur du passé de son grand-père atteint par la silicose, maladie provoquée par l'inhalation des poussières de charbon. Si ce film, à l’ambiance onirique, offrait un beau travail graphique au fusain, il souffrait aussi d’un scénario quelque peu décousu. Avec Grise Mine, Rémi Vandenitte, lui, décide d’établir un autre lien entre passé et présent. Il nous plonge au cœur même de la fosse, en compagnie d’un mineur perdu au centre de la terre. La mine qu’il crée semble tout droit sortie d’une description de Zola, avec son « air mauvais de bête goulue, accroupie là pour manger le monde."
Comme dans le film précédent, Rémi Vandenitte a choisi d’évincer toute parole pour laisser place à l’image et à une création sonore remarquable faite d’écho et d’impacts. Le clapotis de l’eau, le gargouillis des insectes, le cliquetis des pas nous entraînent dans un univers angoissant et claustrophobique.
Son image, il l’a choisie proche de la gravure, jetant ainsi un pont entre sa texture et sa structure narrative : graver, c’est aussi creuser dans le matériau. Chaque planche, comme un tableau à part entière semble ainsi porter la trace de ce qu’il a été.
Les effets de contrastes, sans dégradé de gris, et le subtil jeu de lumières et d’ombres, donnent aux dessins une qualité brute qui n'est pas sans lien avec l'histoire. Les noirs semblent se répandre et inonder le cadre alors que les blancs s’imposent comme des vides qui prélèvent de la matière. Il met ainsi en valeur les formes simples et les motifs qui apparaissent et disparaissent à la lueur de la lampe. Evitant de se laisser envahir par le côté sentimental du sujet (son grand-père était mineur), Rémi Vandenitte conserve une distance, une ironie, qui n’empêchent en rien de faire émerger la conscience de l'Histoire et le désir de mémoire.

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