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Les Voix de l’ombre, film collectif

Publié le 26/08/2024 / Catégorie: Critique

Le collectif « Extérieur jour » offre l’opportunité aux Bruxellois de réaliser, en groupe d’environ 10 personnes, un film d’une durée de 26 minutes sur un sujet au choix.

Cette activité est ouverte à tous ceux âgés entre 18 et 90 ans et c’est toutes les 4 semaines qu’une équipe se met à travailler à la réalisation d’un nouveau film. Avec Les Voix de l’ombre, c’est dans l’univers du doublage qu’ils nous emmènent. En moins de 30 minutes, ce fabuleux documentaire, bourré d’inventivités, parvient à nous faire découvrir tout ce qui tourne autour de cette discipline, de sa naissance, jusqu’à son évolution de nos jours. 

Les Voix de l’ombre, film collectif

D'emblée, Les Voix de l’ombre séduit par sa narration fluide et captivante. Le documentaire parvient à rendre son sujet fascinant dès le départ. Ce qui est particulièrement admirable, c’est qu’ils ont réussi en seulement 26 minutes à être réellement complets et détaillés sur la thématique du doublage, ce qui est une belle prouesse quand on connaît la richesse de cet univers. Le film est très explicatif, mais sans jamais perdre le spectateur. Il est également ponctué de petites séquences de transitions animées en stop-motion, qui sont d’une qualité très impressionnante et qu’on n’a pas l’habitude de voir dans ce style d’œuvre. Cela prouve encore plus l’immense talent des personnes derrière ce film. Nous avons pu interroger l’un de ses créateurs, Sunny Latchoomun, qui nous a confirmé qu’ils ont tout fait à la main, sauf les fonds qui ont été réalisés digitalement. Ils ont bénéficié aussi de l’aide d’un monteur professionnel qui a peaufiné leur animation.

Tout le long du documentaire, nous allons rencontrer plusieurs personnes spécialisées dans le domaine du doublage. La première, Geneviève Maubille, une enseignante à « Louvain School of Translation and Interpreting » va revenir sur les origines de cette pratique. À l’époque du cinéma muet, les dialogues étaient représentés par des intertitres, c’est à l’arrivée du cinéma parlant, à l’extrême fin des années 20, que le doublage est né.

Elle va nous expliquer comment s’est déroulée cette transition entre le muet et le sonore et de quelle manière la pratique du doublage s’est démocratisée.

On va ensuite nous présenter des comédiens de doublages, Olivier Cuvellier et David Scarpuzza, qui vont nous relater toutes les facettes de leur métier et ce qui les a amenés à l’exercer.

Ils vont également nous expliquer comment la profession a évolué en Belgique, en se penchant sur des événements du passé comme la grève des doubleurs en France dans les années 90, revendiquant une réestimation de leurs salaires. Par conséquent, de nombreux studios sont venus en Belgique trouver leurs nouveaux doubleurs.

Nous allons ensuite faire la rencontre de Emmanuel Maindiaux, le directeur du studio Digital Factory.

Il va nous donner des détails sur la manière dont est géré un studio de doublage. Il va décrire les contacts avec des clients qui désirent trouver une voix pour leur programme, ensuite de quelle façon on sélectionne un comédien, puis comment et avec quels supports l’enregistrement se déroulera. 

Le documentaire va également s’intéresser à des concepts comme l’isochronie dans le doublage. Pour une isochronie réussie, il faut que le son enregistré soit raccord avec les mouvements des lèvres des acteurs, si cela n’est pas effectué correctement, cela se remarque immédiatement.

On s’interroge aussi sur les choix d’adaptation qui sont faits lors de la traduction des dialogues. 

Pour que le doublage d’un film étranger fonctionne dans notre culture, il faut parfois changer les mots de la version originale, ils ne doivent pas être respectés à la lettre, c’est leur effet qui doit être conservé, le spectateur doit saisir le message que veut transmettre l’œuvre qu’il regarde. 

Pour finir, le documentaire va se pencher sur les droits des doubleurs belges et sur le risque des intelligences artificielles pour le métier. 

La parole sera donnée à David Macaluso, un comédien de doublage belge à l’origine de la convention sur le doublage. Il y raconte la naissance de cette convention et son impact sur l’évolution des droits des doubleurs en Belgique.

La problématique des intelligences artificielles sera ensuite abordée. La technologie se perfectionne rapidement, comment garantir que les comédiens pourront continuer à exercer sans être dépassés ? Il est évident que cela pose un enjeu éthique considérable.

Les Voix de l’ombre est une brillante réussite, le documentaire est passionnant et traite parfaitement son sujet. Il fourmille de détails et d’informations, il nous apprend énormément sur cet univers trop méconnu qu’est le doublage. Selon Sunny Latchoomun, ils possédaient plus de 6 heures d’interviews et ils ont dû sacrifier des parties très importantes pour arriver aux 26 minutes. L’exercice a été effectué magnifiquement, car la narration est excellente. Rajoutons à cela une belle mise en scène truffée d’inventivité. Les créateurs de ce superbe documentaire sont, sans aucun doute, des artistes à suivre de près.

 

Le film est disponible, comme tous les Exterieurs jours après diffusion sur Bx1, sur YouTube :

https://www.youtube.com/watch?v=mJEF3CCE-1c&t=2s

 

Jules de Foestraets

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