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Projection de films de fin d’études à la Fête du Cinéma Belge - décembre 2006

Publié le 12/01/2007 par / Catégorie: Critique

Regards dans le rétro
Histoire de terminer une année 2006 en beauté, l’asbl Un soir... un grain organisait, du 26 au 31 décembre, la « Fête du cinéma belge », où le public aura pu assister à la projection de dix longs métrages belges sortis en 2006, à des projections de courts métrages primés et enfin à une sélection de films d’écoles. 

affiche fête du cinéma belgeL’occasion de se pencher sur l’apprentissage du cinéma en Belgique francophone où coexistent plusieurs écoles dont l’INSAS, l’IAD, l’INRACI et La Cambre qui étaient toutes représentées à cette projection. La Cambre avait le privilège de présenter deux films : Le Temps d’une cigarette de Jérémie Mazurek et Télérific Voodoo de Paul Jadoul. Deux films d’animation dont la légèreté dénotait par rapport aux fictions des autres écoles. Ces deux films de La Cambre ne sont pourtant pas des travaux de fin d’études mais des films qui ont clôturé la quatrième année des réalisateurs sur un cursus de 5 ans.
Le Temps d’une cigarette joue la carte de la poésie à travers un personnage qui emménage dans un nouvel appartement à Bruxelles et qui doit affronter les petits tracas que cela engendre. Allez, il a bien le temps de s’en fumer une, histoire de partager avec le spectateur le pourquoi de tout ça. Dessiné sur papier, puis conçu numériquement, Le Temps d’une cigarette est un film sympathique qui a reçu le prix de l’image numérique au festival Média 10/10. Jérémie Mazurek est français, passionné très tôt par le dessin, il est arrivé à La Cambre après avoir été séduit par des films sortis de cette école.
Télérific Voodoo de Paul Jadoul est réalisé sous forme de clip ; une musique electro entraîne le spectateur dans une évolution condensée de l’humanité, depuis que l’homme est descendu de l’arbre jusqu’à la construction d’une mégapole, en passant par des guerres fratricides, l’importance de se créer des icônes et le besoin de se développer. L’humanité se sait condamnée à la disparition par un décompte dans le haut de l’écran.
Sur les 5 années d’études, les étudiants réalisent un film par an. Si la frontière exercice scolaire/œuvre à part entière n’est pas toujours facile à cerner, on peut considérer que durant les deux dernières années, les étudiants mettent en pratique l’acquis des trois premières dans des films personnels.
Les étudiants, au nombre de 6 à ce stade du cursus sur 12 admis en première, bénéficient du confort matériel et temporel et de la liberté dans la conception de leurs films. Une évaluation de la faisabilité des films est faite en début d’année : à l’étudiant de montrer ce qu’il a dans le ventre. Notons que les coûts de fabrications des films sont moindres dans le cadre de ces études. Un Atelier de production aide tous les films des étudiants grâce aux subsides de la communauté française. Point de soucis matériels. Des collaborations avec des étudiants de l’INSAS, de l'IAD ou encore du Conservatoire national de musique sont organisées dans un esprit d'enrichissement mutuel. Les étudiants de La Cambre ont, depuis 5 ans, pris en charge la diffusion de leurs films dans les festivals via la création de l'Association pour la Diffusion des Films d'Animation de La Cambre. Jérémie Mazurek et Paul Jadoul ambitionnent de créer bientôt, avec deux autres étudiants, leur propre studio d’animation et ont réalisé à la Cambre, la bande-annonce du festival Anima.
La démarche de création d’un film d’animation implique de faire avec rien. Le moindre élément du film devient un élément où il faudra exercer sa créativité. « L’hétérogénéité des étudiants, au niveau de leurs connaissances et surtout de leur imagination, demande dans l’enseignement et particulièrement dans l’enseignement artistique une pédagogie différenciée; chaque étudiant est une personnalité qui mérite une attention et une orientation particulières. Développer une pédagogie qui a, pour finalité, d’aider l’étudiant à construire par lui-même son savoir, à se l’approprier. Proposer des moyens qui permettent d’apprendre à apprendre, plutôt que d’asséner une vérité toute faite. » Telle est la pédagogie prônée par La Cambre dont l’accès impose la réussite d’un concours d’entrée et dont le coût annuel en frais d’études tourne autour de 400 Euros.
Le court métrage de l’IAD, Les Habitants de Raphaël Balboni est bercé par un humour absurde qui bascule du risible à la panique lorsqu’un employé de l'administration du regroupement des collectivités des départements territoriaux rencontre les fameux habitants. Tourné en pellicule, le film a été montré au festival de Namur. Myosotis, film de l’INSAS réalisé par Thomas Caselli, raconte, dans une sorte de huis clos elliptique, les rapports entre une mère et son fils sur fond de la fatalité du temps qui passe. Entre deux battements d’Aurélie Wancket, ancienne étudiante à l’INRACI nous invite à vivre avec une jeune fille enceinte les pressions externes qu’elle doit subir. La méthodologie d’une école de cinéma diffère évidemment de l’animation. À l’INRACI, il n’y a pas d’option réalisation proprement dite mais un ensemble de techniciens polyvalents dont certains émettront le désir de réaliser un scénario. Une mise en concurrence des scénarios proposés se fait en début de troisième année. Une fois la sélection terminée, l’étudiant travaille encore plusieurs mois sur le scénario avec un professeur. L’étudiant se crée une équipe qui aura une quinzaine de jours pour le tournage et une post-production d’une durée équivalente. L’INSAS et l’IAD proposent une section par secteur d’activité en cinéma et le film de fin d’étude sera réalisé par un étudiant de la section réalisation. La question du budget des films se pose. Par exemple, un film de fin d’étude de l’INRACI coûte autour de 15 000 Euros. L’école n’étant pas subventionnée, à l’inverse de l’INSAS et de l’IAD, le financement du film est à charge exclusive des étudiants qui auront cotisés durant trois ans. Cette particularité fait de l’INRACI, l’école la plus coûteuse, trois fois plus que l’INSAS, deux fois plus que l’IAD. On peut d’ailleurs observer que seule l’INRACI tourne tous ses films de fin d’études en vidéo. L’accès à l’INRACI n’est pas soumis à un concours d’entrée et on retrouve en fin d’études un nombre d’étudiants proche des deux autres écoles.
En conclusion, la formation audiovisuelle en Belgique offre une belle diversité. Il faut remarquer la grande qualité technique de l’ensemble des films projetés. Il n’est d’ailleurs pas rare qu’un film de fin d’études se retrouve en festival aux côtés de professionnels aguerris ou soit diffusé en télévision. Un large panel de formations de qualité existe. Tant mieux pour ceux qui aspirent à pratiquer le cinéma. Restent encore les questions du talent et de l’existence de structures qui accompagnent le diplômé en techniques du cinéma.

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