Cinergie.be

Rencontre avec Sophie Berque, responsable de la cellule Webcréation de la RTBF

Publié le 18/05/2018 par David Hainaut / Catégorie: Entrevue

« Les webséries, comme les séries, participent à un nouvel écosystème labellisé belge »

Si les séries belges font parler d'elles, les webséries ne sont pas en reste. Depuis 2014, la RTBF en a développé plusieurs (Typique, Euh, Burkland, La Théorie du Y...), avec un certain succès, puisque qu'elles ont permis à la chaîne publique de truster une cinquantaine de prix dans le monde.

Rencontre avec Sophie Berque, manager de la cellule Webcréation de la RTBF, à l'aube d'un mois de mai qui permettra au public de sélectionner la prochaine, à partir de quatre nouveaux pilotes (Boldiouk & Bradock, Mauvaise Langue, Plato, The Yellow Guys). L'occasion de dresser un petit bilan sur ce format particulier. Et une success story...

Après les succès de Euh, Burkland et La théorie du Y, la RTBF vous propose à nouveau de choisir le pilote dont vous souhaitez voir la suite. Les votes sont ouverts jusqu'au 23 mai à 12H00 !
Lien pour voter : https://www.rtbf.be/webcreation/vote

Cinergie : On l'aura compris, les projets ne manquent pas, au sein de votre cellule...
Sophie Berque : C'est sûr! En plus de ce dernier appel à projets pour webséries, nous venons d'en lancer un autre avec la Fédération Wallonie-Bruxelles pour la fiction uniquement sonore, qu'on nomme "podcast natif". C'est un nouveau test après C'est tout meuf lancé cet hiver, avec des témoignages de femmes. Et nous venons d'entamer le tournage la deuxième saison de PLS, une série destinée elle au réseau social Snapshat.

C. : Votre poste implique donc de coordonner tout cela ?
S.B. : Oui. Comme manager de la webcréation de la RTBF depuis 2014, je suis chargée de développer des contenus spécifiques pour Internet, en fiction - sonore ou non, donc -, en websérie ou en webdocumentaire, et toute expérience interactive ou en transmédias (...). Depuis peu, nous nous lançons dans la réalité virtuelle, avec l'utilisation de casques, de lunettes, etc. Pour une équipe de trois personnes, ce n'est pas si mal ! Mais c'est surtout plaisant de faire connaître et vivre des talents belges francophones : comédiens, créateurs, réalisateurs ou scénaristes. On baigne dans une nouvelle industrie, avec de nouveaux contenus. Et donc, de nouvelles personnes.

C. : Concernant vos contenus, leur point commun reste bien la "belgitude" ?
S.B. : Toujours, oui. C'est, depuis le début, la particularité de notre ligne éditoriale de proposer des univers propres au public belge francophone, avec des atmosphères et des saveurs de chez nous, avec notre humour, notre manière de raconter et notre patte. Ce qui n'empêche pas l'audace et l'universalité. Car l'envie, c'est de pouvoir parler à tous les publics!

C. : Vos objectifs semblent pour l'heure atteints. Voire dépassés ?
S.B. : Complètement! Jamais nous ne pensions en arriver là ! Il y a quelques années, quand j'appelais des collègues à l'étranger, j'avais l'impression d'être le Petit Poucet. Alors qu'aujourd'hui, certains n'hésitent pas à nous présenter comme les champions de la websérie en Europe (air gêné) ! Puis, l'arrivée de la plateforme Auvio à la RTBF, en plus de Youtube, nous a permis d'élargir notre spectre. Notre mission, c'est aussi de toucher la génération Y (les personnes nées entre 1980 et 2000) et Z (après 2000). En peu de temps, nous sommes passés d'un public de niche en festivals à des audiences de masse !

C. : ...avec un retentissement international parfois loin d'être anodin...
S.B. : Oui. Vu que nous sommes souvent en compétition ou conviés à des conférences ou des jurys à travers le monde, nous avons l'occasion de faire rayonner bien loin ces nouveaux formats. Même si paradoxalement, nous devons encore parfois enfoncer quelques portes ouvertes en interne, certains collègues nous voyant encore comme des ovnis, dans les couloirs de la RTBF (sourire).

C. : Les séries, et à présent les webséries : vous participez à une certaine émulation, dans le secteur ?
S.B. : Oui, car à travers ces séries ou ces webséries, on sent une volonté de faire vivre un nouvel écosystème labellisé belge, avec comme plus-value des contenus, des émotions, et des histoires qui nous parlent. Nous pouvons tout à fait vivre en étant complémentaires aux géants tels qu'Amazon, Google ou Netflix. Ce que les Scandinaves ont compris depuis longtemps !

C. : À propos de l'appel à projet pour webséries en cours, où en est-on ?
S.B. : Nous venons donc de mettre en boîte quatre nouveaux pilotes de webséries. Après le vote du public courant de ce mois de mai, la websérie gagnante pourra tourner une saison de dix épisodes. Dans un ordre tout à fait aléatoire, il y a Mauvaise Langue, qui mixe thriller et horreur, Plato, une dramédie autour de la téléréalité, The Yellow Guys, une comédie dans les coulisses du cinéma et Boldiouk & Bradock, une comédie fantastique. Comme nous veillons à proposer des genres bien distincts, il y en a pour tous les goûts.

C. : Une websérie lauréate, mais donc... trois autres recalées. Celles-ci pourraient néanmoins se tourner par la suite ?
S.B. : Ce système de sélection peut en effet faire quelques déçus, mais si une websérie non-sélectionnée se fabrique par la suite, nous restons dans les parages et pouvons même revenir plus tard dans le projet. Puis d'autres guichets d'aide existent, de Screen Brussels à France Télévision, en passant par Arte ou Wallimage (...). Cela dit, nous ne fermons pas la porte quand un projet intéressant nous parvient le reste de l'année ! Un appel à projet est surtout nécessaire pour stimuler l'industrie. N'oublions pas qu'avec notre petite équipe, nous chapeautons chaque projet de A à Z ! J'espère qu'à terme, en marge de la transformation de la RTBF, nous aurons plus de ressources plus de présence encore, car nous tenons à rester dynamiques, passionnés, motivés, proactifs et positifs. Pour que ce vaste processus fonctionne, il s'agit aussi de pouvoir partager ces valeurs.

C. : En 2018, les séries télé se regardent de plus en plus sur Internet, et certaines webséries sont diffusées en... télévision. Cela pourrait-il présager d'une fusion de ces deux pôles?
S.B. : La question est intéressante, puisque la réinvention est infinie. On peut en effet imaginer un jour l'existence d'un grand pôle de fiction unique, mais dans lequel on développerait toujours de la série au sens télévisuel, et de la websérie ou de la série digitale, au sens web. Car la particularité d'une websérie, outre sa durée maximale de dix minutes, c'est que son installation, son histoire et ses personnages se construisent différemment, avec des écritures et des montages plus dynamiques. La webcréation reste un laboratoire : davantage que favoriser une simple "politique du clic", il y a d'abord la priorité de raconter des choses originales. Car d'un média à l'autre, les besoins du public, les cibles, les enjeux et les objectifs diffèrent encore. Même en 2018! (sourire)


Lien pour voter : https://www.rtbf.be/webcreation/vote

 

 

Tout à propos de: