Sottovoce
La grande erreur est de croire que la scénarisation du documentaire, c'est d'aller vers la fiction. C'est au contraire retourner de manière différente vers la réalité. (Luc Jabon)
La grande erreur est de croire que la scénarisation du documentaire, c'est d'aller vers la fiction. C'est au contraire retourner de manière différente vers la réalité. (Luc Jabon)
Difficile de résumer ce premier long métrage de Claudio Pazienza car de scénario, à proprement parler, il n'a pas. Le film s'organise à partir de multiples récits rendant compte de la réalité d'un petit village des Abruzzes, en Italie, où le réalisateur retrouve une partie de ses origines en évoquant la vie de son cousin Mario, décédé en cours de tournage, et en mettant en scène le témoignage oral de sa veuve.
Pour ce faire, le film va emprunter les modes et les genres cinématographiques les plus divers, alliant le home movie au documentaire ethnographique, la reconstitution historique au témoignage fictionnalisé, la recherche expérimentale au théâtre filmé.
Mais le réalisateur va aussi tenter d'aborder une quantité de thèmes et de sujets dont le traitement sera loin d'être évident: quête de l'identité et rôle de la famille, mutation et évolution des moeurs en milieu rural et traditionnel, condition de la femme dans un milieu machiste, effritement d'un passé culturel face aux techniques de communications actuelles, bref, toute une société tiraillée et déchirée par l'évolution du monde moderne. Et bien vite, cette accumulation d'approches et de sujets va lasser par un manque manifeste de contrôle du récit global du film.
Car si Sottovoce fourmille d'inventions de mise en scène , de trouvailles d'écriture, d'idées de fiction, la marche et la pertinence de son propos restent pour le moins confuses. Loin de nous éveiller à la vie de ce village, de nous sensibiliser à l'histoire douloureuse de la femme de son cousin Mario, Claudio Pazienza tombe dans le piège d'un certain formalisme conservant la fiction pour la fiction et le documentaire pour le documentaire, sans trouver une nouvelle réalité où ces approches s'uniraient, voire fusionneraient.
Très vite, par ce côté touche à tout, touche à rien, le film s'installe dans une absence de regard et d'engagement, résumant les êtres humains à des mises en photographies sans aller jamais au fond des choses, et ratant ainsi, finalement, l'essentiel de son parcours: l'émotion et la complicité.
Il n'empêche que les intentions sont belles et se laissent souvent deviner, qu'il y a là une tentative (avortée) de confondre réalité et fiction jointe à des réelles qualités de mise en scène, mais que tout cela demande encore à se mesurer à la vie, à quitter cette logorrhée cacophonique du vouloir tout dire pour une réelle prise de parole.